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un châtiment sévère, infligé de loin en loin aux audacieux forbans qui avaient compromis la sécurité de leur commerce ou violé quelque portion de leur territoire, c’est là tout ; mais une action simultanée, de grandes expéditions combinées dans l’intérêt du commerce en général, nous ne les trouvons à aucune époque, dans le cours d’un quart de siècle qui s’est écoulé depuis la signature du traité de 1824.


III. - CELEBES ET LE PORT DE MANGKASSAR. - ETABLISSEMENS DE SUMATRA, DES MOLUQUES, DE BALI.

L’établissement des Hollandais à Mangkassar date d’une époque antérieure à celle de leurs premières tentatives sur Bornéo. L’importance actuelle de leur domination y est aussi plus grande. La population qui subit leur influence est plus condensée, plus homogène ; et le génie des peuples soumis, des Bouguis en particulier, les porte vers la navigation et le commerce. Il y a long-temps que les publicistes hollandais ont remarqué cette tendance chez les habitans de Célèbes. Les Hollandais, dans l’intérêt de leur commerce d’épices, avaient toujours posé, comme base de leurs traités avec les habitans de Célèbes, que ceux-ci s’abstiendraient de tout commerce et de toute navigation. Telles sont, entre autres, les conditions du contrat de Bongay. Le peuple de Célèbes s’était toujours révolté contre ces conditions, et cette résistance instinctive avait eu pour effet de diminuer considérablement les profits que les Hollandais tiraient de leurs colonies à épices. Le gouverneur Van der Capellen, ayant visité toutes ces îles, acquit la conviction que l’ancien système devait être réformé. Il y apporta, en effet, de grandes modifications par l’abolition, entre autres, des lois relatives à la destruction des arbres à épices. L’importation et l’exportation par les indigènes furent soumises à des droits, et le résultat de ce nouveau système fut de quintupler en cinq années les revenus de ces colonies.

De là à l’affranchissement du port de Mangkassar il n’y avait qu’un pas ; mais ce pas, indiqué depuis vingt ans par les Anglais eux-mêmes, le gouvernement hollandais, qui en tout se hâte lentement, n’a pu se décider à le faire que lorsque l’établissement des Anglais à Laboean et Sarawak, comme succursales de Singapour, est devenu une menace évidente pour l’avenir du commerce hollandais dans l’archipel. L’ouverture du port de Mangkassar n’est donc pas seulement la continuation du système de réforme de M. Van der Capellen, c’est aussi une protestation contre Laboean et une invitation adressée aux Bouguis de fréquenter Mangkassar plutôt que Singapour, avec la promesse qu’ils y trouveront les marchandises européennes dont ils alimentent tous les comptoirs dans la partie orientale de l’archipel. Singapour offre, il est vrai, un grand avantage, à cause de sa situation sur la route des Indes en Chine ; mais on ne peut nier que, pour les voyageurs qui se