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sur la Baltique, la mer Noire et l’Adriatique. La grande erreur de l’opinion à cet égard, c’est d’avoir cherché dans la question de race une question de liberté non encore posée. La liberté a prêté son nom à l’alliance des Allemands et des Magyars, formée dans l’intérêt de la conquête contre les Slaves conquis. Ceux d’entre les Slaves qui, par un ardent désir de secouer cette domination, en ont appelé les premiers aux armes, sont à la vérité les moins avancés en connaissances et en lumières, et, en s’arrêtant aux apparences, on a pu voir en eux des barbares armés contre la civilisation ; mais la civilisation n’était pas plus menacée par les Illyriens que la liberté n’était défendue à Vienne par les Allemands unis aux Magyars. Non, la démocratie n’était point en cause. Que son heure sonne en Autriche, et ce ne sont point les Slaves qui la repousseront. Elle est dans le génie même de leur civilisation. Partout où les circonstances historiques leur ont permis de se constituer librement, ils se sont organisés sous une forme démocratique, depuis la Pologne primitive jusqu’à la Serbie actuelle. Avant d’entrer dans le débat des questions de liberté, ils ont voulu toutefois développer, assurer leur existence nationale, conquérir une patrie ; avant de planter l’arbre, ils ont voulu préparer le sol, et, sur ce sol rajeuni, la démocratie, une démocratie originale et forte, pourra sans doute bientôt fleurir.


HIPPOLYTE DESPREZ.