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simplement une occasion d’être partie agissante dans une question d’où peut dépendre le sort de la Baltique ? ou bien n’avait-elle point quelque arrière-pensée de faire revivre, elle aussi, à l’exemple de l’Allemagne, les titres féodaux de la famille impériale de Holstein-Gottorp sur une portion du Holstein, dans le cas où la monarchie danoise tomberait en dissolution ? Toujours est-il qu’elle montra, dès le commencement de la lutte et plus encore par la suite, des dispositions très bienveillantes pour le cabinet de Copenhague. Une note diplomatique de cette puissance, analogue à celle de la Suède, suivit de près celle du cabinet de Stockholm, et la flotte russe fut envoyée en croisière dans les eaux de l’archipel danois, sous les ordres de l’un des fils du czar. Les Allemands ont fait un crime aux Danois du concours de la diplomatie russe ; mais l’accusation est peu sincère, et d’ailleurs, pour le Danemark, le premier intérêt est de vivre et de sauvegarder ses droits. La Russie est ici ostensiblement du côté du bon droit. Le Danemark ne devait pas et ne pouvait pas refuser cet appui, en présence de l’injuste et redoutable agression de l’Allemagne.

Pendant que l’attitude de la Suède et de la Russie se dessinait ainsi peu à peu et se présentait avec un caractère favorable à la cause danoise, la Prusse, qui sans doute ne voulait point paraître intraitable, manifestait, de son côté, l’intention de se prêter à des négociations et demandait officiellement la médiation de l’Angleterre. Le cabinet britannique accueillit cette demande avec empressement. L’Angleterre, puissance médiatrice, ne devait pas être pour le Danemark ce qu’elle eût été comme puissance garante ; mais ne pouvant, quant à présent, compter sur l’appui effectif et armé de l’Angleterre, le Danemark fondait du moins quelque espoir sur les dispositions conciliatrices annoncées par le cabinet anglais. La médiation de la reine d’Angleterre proposée par la Prusse fut donc acceptée par le roi de Danemark, qui émit simplement l’idée d’inviter le cabinet de Saint-Pétersbourg à y prendre part. La Prusse eût peut-être consenti à admettre la Russie officiellement dans cette négociation ; mais tel n’était point l’avis de Francfort. Les négociations s’ouvrirent à Londres sous la seule médiation de l’Angleterre. La confédération germanique, sous la responsabilité de laquelle la Prusse avait couvert sa conduite dès l’origine, accorda officiellement à cette puissance l’autorisation de traiter, depuis lors renouvelée par le vicaire de l’empire.

Le cabinet britannique proposa, le 18 mai, un premier armistice qui paraissait devoir répondre aux vœux des deux parties. Les hostilités cesseraient par terre et par mer ; les deux duchés seraient évacués à la fois par les deux puissances belligérantes ; les troupes insurrectionnelles du Holstein et du Schleswig devraient être licenciées ; on établirait dans chacun des deux duchés individuellement une administration