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la terre, et le pouvoir de punir les méchans. Le culte qu’ils adressent à cette divinité a pour intermédiaire une classe d’individus, qui cumulent avec leurs fonctions de prêtres celles de médecin redoutés et courtisés même par les chefs, car on leur attribue généralement un pouvoir surhumain, et entre autres celui de rendre la divinité favorable ou contraire. On offre aux idoles des libations de vin de palmier ; on égorge sur leurs grossiers autels des poules, des chèvres et d’autres animaux ; on y sacrifie même des hommes dans les occasions solennelles, avec d’horribles raffinemens de barbarie.

Le gouvernement d’Aboh est une monarchie élective et héréditaire à la fois dont il n’y a pas d’exemple dans les constitutions européennes. Lorsqu’il s’agit de choisir un souverain, les anciens, chefs de villages, au nombre de soixante, se réunissent et procèdent à l’élection ; mais leur choix est ordinairement limité aux fils du roi. L’aîné est presque toujours désigné. Cependant il ne faut pas croire que, dans ce conseil on n’examine pas les titres des candidats. Celui qui est considéré comme devant recevoir le plus docilement la direction de ses électeurs a de grandes chances de l’emporter. Le pouvoir du roi d’Aboh est absolu ; il a droit de vie et de mort sur ses sujets ; mais, si sa conduite politique déplaît aux anciens, ceux-ci se défont de lui sans bruit, au moyen du poison. Il est donc entièrement dans leur dépendance. À Aboh, on comptait, à l’époque du passage des navires, dix chefs ou anciens revêtus de différentes dignités. Chaque village a un gouverneur qui est responsable devant le roi et le conseil de L’administration de son district ; en outre, un individu est nommé dans chacun de ces mêmes villages pour rendre la justice. Ses arrêts, dans les cas très graves, peuvent être réformés par un appel au conseil des anciens ; dans les circonstances ordinaires, ses sentences ont besoin de la confirmation du gouverneur. Au nombre des crimes qui sont considérés comme méritant le châtiment le plus sévère est l’adultère avec une des femmes du roi. Les deux coupables sont ordinairement mis à mort, et le témoin même involontaire du crime subit le même sort. Le meurtre est puni suivant la loi du talion, le vol de bestiaux par la pendaison, les larcins par la prison ou le fouet.

Lorsque l’état est menacé, tous les hommes susceptibles de porter les armes suivent le roi à la guerre ; mais, si un village isolé est attaqué à l’improviste par l’ennemi, il n’est pas rare que les habitans des localités environnantes laissent leurs voisins se tirer d’affaire comme ils le pourront.

Aboh a une marine. La flotte africaine du roi Obi se compose de canots de différentes dimensions, conduits par un nombre de rameurs esclaves qui varie de vingt à cinquante. Un petit canon est solidement