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L’ÉMIGRATION POLITIQUE


EN ANGLETERRE.




La petite colonie politique de Londres offrait, l’été dernier, un assemblage de noms assez bizarre. Chaque naufrage révolutionnaire avait jeté là de plus ou moins riches épaves : absolutisme, monarchie constitutionnelle, socialisme, toutes les écoles vaincues s’y trouvaient à la fois représentées. Trop préoccupé des débris du jour pour songer aux débris de la veille, le public français s’enquiert peu des exilés d’outre-Manche ; il y aurait cependant, je crois, quelque attrait de curiosité à les suivre à cette dernière étape qui les a si étrangement rapprochés, et d’où ils s’élanceront demain, les uns vers les hauteurs de l’histoire, les autres dans le grand chemin de l’oubli. Si le lecteur veut bien m’autoriser à lui servir de guide dans cette excursion mentale, je mettrai à son service les renseignemens qu’un séjour de trois mois à Londres m’a permis de recueillir. Ma tâche de narrateur est facile. La chaîne des idées et des traditions politiques a été si violemment rompue, tant d’intérêts nouveaux sont venus successivement balayer la trace des intérêts écroulés, que le passé d’hier semble vieux d’un siècle. On peut remuer sans scrupule des noms qui ne font plus vibrer, au sein des opinions déclassées, ni espérances ni craintes. La préoccupation publique a déjà fait pour eux l’œuvre impartiale du temps.

Claremont appelle naturellement l’attention en première ligne. La