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T*0 REVUE DBS DEUX MONDES. Marguerite; elle souriait, les lèvres entr’ouvertes et le regard fixe : la pauvre petite était morte; j’avais perdu son dernier soupir dans la dernière chanson. (Bertha pousse un cri, se jette au cou de Maurice, et l’embrasse eu sanglotant.) MAURICE. Chère enfant! Voyons, voyons, bonne petite ame! ROSETTE. Bertha, finirez-vous? Je vous demande un peu qu’est-ce qui lui prend. Tu vas friper le col de monsieur, petite sotte ! C’est bon, je vais t’emmener coucher.... Tu permets, n’est-ce pas, Madeleine? J’ai une répétition demain de bonne heure,... et puis je dors à moitié. MADELEINE. A ton aise. Viens m’embrasser, Bertha. Bonsoir, mon enfant. ROSETTE. Bonne chance, messieurs. (Elle emmène Bertha en la grondant.) LE COMTE JEAN. Cousin, vous pouvez croire que je n’aurais pas entamé l’aventure, si j’avais soupçonné seulement le malheur qui l’a terminée. MAURICE. Je le crois, comte Jean. Maintenant j’ai à m’excuser, mademoiselle, auprès de tous vos convives du peu d’opportunité de ce récit; je puis assurer que per- sonne n’a éprouvé à l’entendre l’ennui que j’ai eu à le faire. Il n’a pas plus dé- pendu de moi de vous l’épargner que de le rendre plaisant; mais le rôle de trouble-fète, que j’ai pris ici bien involontairement, me pèse; je sens qu’il y aurait plus que de la gaucherie à le prolonger, et je vous demanderai, comme M^’^ Ro- sette, la permission.... MADELEINE. Du tout; restez, monsieur Maurice. Votre présence est plus nécessaire que vous ne pensez. Milord et messieurs, je suis femme de parole; je vous ai dit que je distinguerais l’un de vous cette nuit dans le cas où mon cœur serait encore libre.... (Vives rumeurs.) Or, mon cœur est libre comme ma pantoufle.... (Elle lance sa pantoufle en l’air; applaudissemens.) Mais, comme je ne pourrais consciencieu- sement faire un choix entre quatre gentlemen d’un mérite si accompli et si égal, j’ai résolu de m’en remettre à vous-mêmes. Voici du papier et de l’encre; vous allez voter au scrutin secret; l’élu de la majorité sera celui de mon cœur. (Mouveraens divers.) d’estival. Je demande la parole. madeleine. On va me dire que, selon toute apparence, chacun se croyant le plus digne et se donnant sa voix, l’opération électorale peut durer jusqu’au jugement der- nier. J’ai prévu l’objection : je confère à M. Maurice le droit de voter.... (Tumulte et Téclamations.) Silence! M. Maurice est électeur, dis-je, mais il n’est pas éligibte. (A la bonne heure!) Maintenant, messieurs, les convenances me faisant une loi de m’éclipser pendant le scrutin, je m’éclipse. Salut à tous, et bon accueil au ▼ainqueur! (Elle sort en chantant ; tous les convives se Qèvent et «fnftourent Maurice; le «omte Jean seul demeuie à l’écart.)