pas immédiatement satisfaits ? C’est que, pour fonder une colonie, il ne suffit pas de lancer dans un désert une foule imprévoyante. Avant d’asseoir un groupe, il faut choisir un emplacement salubre, fertile et pourvu d’eaux, facile à défendre, relié aux lignes de communication naturelle. Après avoir reconnu ces conditions d’avenir, il faut s’assurer des crédits nécessaires pour déblayer le sol, répartir les lots, tracer les aboutissans ; enfin, si le territoire n’appartient pas au domaine, commencent les négociations avec les indigènes pour les amener au désir d’une vente où d’un échange : trop heureuse est l’administration quand elle n’est pas obligée de procéder, par voie juridique d’expropriation à l’égard d’un propriétaire européen il est bien rare que les solliciteurs se rendent compte de ces difficultés, de ces lenteurs inévitables. La plupart des demandes sont formulées par des personnes qui, évidemment, ne connaissent pas encore le pays. Les unes expriment vaguement le désir d’obtenir un nombre, d’hectares, sans désignation du lieu, les autres indiquent une localité sans vérifier si le domaine y possède des terres, si un établissement profitable y est possible.
Le rapprochement de ces notions diverses va nous faire enfin connaître l’étendue totale des terres possédées à divers titres par les Européens :
Propriétés achetées directement aux indigènes par les spéculateurs particuliers | 250,000 hectares |
Terres détachées du domaine et vendues par l’état aux enchères publiques ou à prix débattu, environ | 12,000 |
Concessions provisoires, grandes ou petites, faites par l’état jusqu’à la fin de 1847 | 36,000 |
Concessions particulières et installations collectives faites depuis un an par le gouvernement républicain (approximativement) | 22,000 |
Terres domaniales, un peu moins de | 400,000 |
TOTAL | 720,000 hectares |
Ces 720,000 hectares acquis aux Européens ne sont pas pour cela en état d’exploitation. Les terres du domaine sont incultes, à l’exception des superficies mises en valeur par les militaires à proximité de leurs garnisons, et de certains cantons de la province de Constantine qui sont affermés à des indigènes. Quant aux 320,000 hectares à la disposition des particuliers, il n’y en a pas plus de la dixième partie qui présente, jusqu’à ce jour, une apparence de culture ; il n’y a pas 20,000 hectares qui soient en plein rapport.
Ce ne sont donc pas les terres qui ont manqué à l’Algérie, ce ne sont pas non plus les efforts et les expériences. L’Algérie a donné asile aux idées les plus diverses : les systèmes y ont trouvé, pour ainsi dire, table rase, et, loin de leur faire obstacle, l’autorité s’est prêtée à la mise en œuvre de toutes les conceptions conciliables avec l’ordre public. Par