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Page:Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 1.djvu/951

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la fondation des villages subventionnés, on a voulu créer la petite propriété, favoriser le travail sans capital. Par des concessions de vaste étendue, on a appelé le grand propriétaire, qui promet d’apporter le capital et d’alimenter le travail à ses risques et périls. Entre les petits lots et les grandes concessions, on a semé à dessein des concessions de 30 à 50 hectares, pour fonder la propriété moyenne. Il y a des centres de population dont les élémens sont empruntés à l’armée ; il y a la grande propriété civile, constituée par les achats des spéculateurs, et la grande exploitation militaire, c’est-à-dire les cultures exécutées par les régimens. Le procédé de l’adjudication a été essayé dans la province d’Oran, conformément aux théories de M. de Lamoricière. On a accordé des terres à une communauté religieuse, les trappistes, et à une école socialiste, l’Union du Sig. On a entrepris de féconder le sol au moyen des indigènes, en favorisant leurs rapports avec les Européens, en leur attribuant des concessions directes, en aidant les uns à fonder des villages, en offrant aux autres des terres en pleine propriété, en échange de celles où ils n’exercent qu’un usufruit. Dans les concessions de mines, de forêts, de pêcheries ; dans l’autorisation des établissemens industriels, on n’a eu qu’un but : appeler la population et provoquer la culture. Donations ou ventes à bas prix des biens domaniaux, achats de terres aux indigènes ou même aux détenteurs européens, on a tout fait pour élargir le champ colonisable. Moyens de communications, travaux d’assainissement, subventions, achats des produits par privilège et à bon prix, on a tout fait pour exciter l’émulation parmi les cultivateurs.

Entre tous ces systèmes, la tendance la plus prononcée a toujours été de fonder des centres habitables pour y grouper des colons pauvres. La petite propriété a obtenu la plus large part dans la distribution des terres domaniales. Le but était de constituer une population laborieuse, telle que chaque famille, vivant sur son petit domaine du travail de quelques-uns de ses membres, pût détacher de son sein des ouvriers pour les grandes exploitations. Il y a eu ainsi, antérieurement à 1848, cinquante-six villages installés de manière à recevoir au moins 3,000 familles. Les centres de population destinés à la petite propriété n’ont pas été fondés tous sur le même type. Le plus souvent les concessionnaires ont reçu, avec un lot de terre, une subvention en argent ou en matériel de colonisation, après quoi chacun s’est installé, selon son intelligence, dans le cadre tracé par l’autorité. Quelques autres ont dû leur origine aux essais de colonisation militaire. On avait espéré qu’en vendant par petits lots et à bas prix les bonnes terres du domaine, les acquéreurs se grouperaient instinctivement de manière à former un hameau. Les essais de ce genre ont échoué. La plupart des villages ont été construits aux frais de l’état par le service des bâtimens civils, ou par un entrepreneur a forfait, en employant quelquefois comme auxiliaires