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Page:Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 1.djvu/985

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d’une opinions politique. En un mot, pas une doctrines déifiées depuis un an n’a pénétré dans cet écrit. Il n’y a pas jusqu’à ses habitudes personnelles de style que M. de Barante a conservées dans nos jours de combat plus que de discussion. Les formes parlementaires nouvelles n’ont point altéré son langage. Tandis que le mode de débat en usage surtout dans un certain parti a pour procédé à peu près uniforme l’effet étourdissant d’un coup de massue, M. de Barante a conservé les mêmes formes de discussion douce, polie, sous lesquelles pourtant se font parfois sentir le froid et la pointe d’un acier perçant. Et cependant, bien que le livre de M. de Barante porte si peu l’empreinte des temps révolutionnaires où il a été écrit, il est pourtant vrai de dire que l’ordre d’idées qui y domine se trouve déjà dans un surprenant accord avec la réaction qui s’opère de jour en jour dans le sentiment public ? Le livre entier aurait pu être écrit avant la révolution de février ; mais il emprunte aux exemples de cette triste année une force de démonstration nouvelle, et il ne peut manquer de rencontrer chez les esprits éclairés par une récente et douloureuse expérience une adhésion plus empressée. Il est ainsi une nouvelle preuve de ce qu’il y a de force et d’avenir dans ces opinions modérées qui forment comme le centre de gravité du pendule ; un choc peut en écarter, le moindre instant de repos y ramène.

Où cette vérité est surtout sensible et ressort du récit pur et simple des faits, c’est dans les premiers chapitres de ce petit ouvrage. L’auteur y passe en revue toutes les formes diverses que nos révolutions ont successivement données au gouvernement et à la législature. Dans cette rapide énumération, les vices de nos huit à dix constitutions sont indiqués, comme en passant, par un trait qui frappe toujours au point juste. Leur sort est expliqué avec une netteté rare par un tableau concis des passions et des circonstances au sein desquelles elles ont pris naissance ou pris fin. La constitution de 94, sortie de la décomposition du pouvoir absolu, et érigeant en articles de loi toutes les méfiances d’une nation toujours frondeuse, affranchie d’hier et long-temps opprimée ; les velléités honnêtes de la constitution de 95, essayant de faire naître l’ordre du sein même des traditions et des principes du désordre, et travaillant à cet accouplement bizarre avec toute la candeur de cette philosophie politique du XVIIIe siècle que les faits ont toujours déçue sans la jamais désabuser ; les précautions ingénieuses de la constitution de l’an VIII destinées à élever une monarchie nouvelle sur le piédestal même de la république : toutes ces phases diverses sont décrites en deux mots et par un dessin correct et pur qui ne permet plus de les méconnaître. M. de Barante a-t-il eu sous les yeux quelques modèles qui l’aient aidé à reproduire si bien le passé ? Sous ce récit, innocent en apparence, y a-t-il quelque allusion et même