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vagabondage. La publication des nouveaux décrets suffit à réchauffer pour quelque temps l’enthousiasme attiédi.

Notre représentant à Rome avait trop de sagacité pour n’être point effrayé, dès le début, de la tournure que prenaient les relations du souverain et de ses sujets. Faire attendre des réformes sages et désirées assez long-temps pour provoquer l’impatience des masses, puis, au premier symptôme de mécontentement, à la première émotion populaire, les concéder précipitamment, paraissait à M. Rossi la plus détestable des combinaisons. Autorisé par les instructions du ministère français, il crut devoir apporter au gouvernement romain le secours de sa précieuse expérience. Que n’a-t-on pas dit sur les conseils rétrogrades que le cabinet du 29 octobre avait voulu faire accepter à la cour de Rome, sur l’opposition incessante de l’ambassade de France aux desseins libéraux du saint père ! On va voir combien cette assertion était loin de la vérité. C’est un spectacle curieux et instructif que celui que donnait notre ambassadeur à Rome, ne perdant pas une occasion de signaler à l’avance les dangers contre lesquels, à peu de jours de distance, l’administration du pape ne manquait jamais de venir se heurter ; indiquant précisément, au moment où elles étaient opportunes, où elles auraient été reçues avec reconnaissance, des concessions que, plus tard, il fallait accorder sans bonne grace et sans profit. Depuis les derniers mois de 1846 jusqu’à la veille de la révolution de février, M. Rossi ne se lassa pas, chaque fois que son assistance fut réclamée, de faire entendre de si sages paroles qu’elles n’ont depuis, hélas ! que trop ressemblé à des prophéties.

Voici ce qu’il écrivait, le 18 décembre 1846, en rendant compte d’une première conversation avec le saint père :

« …Votre sainteté, lui dis-je en terminant, a commencé un grand pontificat. Elle ne laissera pas, j’en suis certain, avorter une si belle œuvre. Elle sait que nul n’y porte un intérêt plus vif que le roi, mon auguste souverain, et que son gouvernement. Notre politique est connue. Nous applaudissons hautement à tout ce qui consolide l’indépendance des états, la prospérité des nations, la paix du monde… »

Puis il disait quelques lignes plus loin :

« … Qu’on ajoute à tout cela qu’après tout il n’y a rien de fait encore ; qu’il n’y a eu jusqu’ici que des promesses, des projets et des commissions qui ne travaillent guère, et on ne sera pas surpris d’apprendre que le pays commence à se méfier et à s’irriter. Il n’accuse pas le pape de duplicité, mais il le suspecte de faiblesse… Ce qu’il faut conclure de cet ensemble de faits, c’est qu’il importe plus que jamais de tranquilliser l’opinion, en lui montrant, par de sages mesures, que les promesses de sa sainteté n’ont pas été illusoires et que rien ne s’oppose à leur accomplissement. Aussi, j’ai, dans une nouvelle audience, répondu avec une entière franchise au saint père que tout retard dans