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de notre temps avec ses élémens comiques comme avec ses élémens sérieux, chercheront à déchiffrer les vaudevilles, les caricatures et les pamphlets dont nous sommes chaque jour inondés, il est probable qu’ils jetteront plus d’une fois leur langue aux chiens. C’est avec des difficultés de cette nature que M. Wright s’est trouvé aux prises ; difficultés plus grandes encore que celles qui attendent nos futurs historiens, car ceux-ci auront le secours des nombreuses collections qui se forment tous les jours. Nous pourrions signaler, par exemple, parmi les matériaux de ce genre les plus intéressans et les plus précieux, les Souvenirs numismatiques que publie en ce moment le savant et spirituel directeur du musée d’artillerie, M. de Saulcy, et qui seront d’une très grande utilité pour les historiens futurs de la révolution de 1848. Mais pour l’ouvrage de M. Wright, ces matériaux manquaient ou n’existaient que d’une manière très incomplète. L’auteur de l’Angleterre sous la maison de Hanovre a fait plus que d’illustrer l’histoire par la caricature ; il serait aussi juste de dire qu’il a illustré la caricature par l’histoire.

L’ouvrage embrasse le règne des trois Georges, et principalement deux périodes : la première qui se rapporte à l’établissement définitif de la dynastie de Brunswick, la seconde à la lutte de l’Angleterre avec la révolution française et avec l’empire.

Jamais peut-être deux époques historiques n’offrirent autant de points de ressemblance que la période qui suivit en Angleterre la révolution de 1688 et celle qui suivit en France la révolution de 1830. Le caractère commun, souvent méconnu et mal compris, de ces deux révolutions fut à la fois libéral et aristocratique. Il faut naturellement tenir compte des différences aussi bien que des ressemblances ; ainsi l’élément aristocratique ne pouvait être en France le même qu’en Angleterre. En 1688, c’était le parti protestant et les grandes familles whigs qui étaient à la tête du mouvement ; en 1830, c’était le parti philosophique et doctrinaire ; mais, de part et d’autre, c’était l’aristocratie pensante et agissante, c’était l’élite de la nation.

Aussi voyons-nous dans l’histoire des deux pays, et immédiatement après les deux révolutions, le parti tombé, c’est-à-dire le parti de la suprématie royale et de la haute église, chercher les mêmes points d’appui et de résistance, réclamer le suffrage universel, et faire appel aux classes inférieures dont la grande généralité était restée étrangère à la révolution. Nous croyons que plus la lumière se fera dans l’histoire de 1688 et celle de 1830, plus ce double caractère de libéralisme et d’aristocratie deviendra incontestable. Toutefois, le point sur lequel les deux révolutions et les deux régimes nouveaux qui en sortirent cessent de se ressembler, c’est qu’en Angleterre il y avait une aristocratie appuyée sur l’hérédité, sur la primogéniture et sur la grande propriété,