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C’est à cette scène et ce qui s’ensuivit (qui l’ignore ?) que se termine le huitième volume de l’Histoire du Consulat et de l’Empire, où l’historien laisse sur le trône d’Espagne Joseph-Napoléon, assis là par ordre de son frère, qui créait un danger pour dissiper une crainte, selon la belle expression de M. Mignet[1]. Résumons-nous : il résulte du livre de M. Thiers que rien ne justifie Napoléon des moyens qu’il a employés, ni les nécessités de sa dynastie, ni l’état de l’Espagne, ni le besoin de combattre l’Angleterre, ni la bassesse et les trahisons de Godoy, ni la médiocrité et la faiblesse de Charles IV, ni l’avilissement de la reine. L’historien de Napoléon n’a pas dissimulé l’inutilité des procédés odieux de son héros, la vanité de ses calculs ; il a rempli en honnête homme un devoir pénible. En terminant le dernier chapitre, qu’il a intitulé Bayonne, du lieu où se dénoua le grand drame qu’il retrace, M. Thiers dut éprouver ce que Napoléon éprouva après avoir laissé apparaître toute sa pensée devant Escoïquiz, se sentir le cœur soulagé d’un lourd fardeau ; mais Napoléon n’eut pas le bonheur de son historien, il ne venait pas de remplir douloureusement, il est vrai, une louable et honorable tâche.


L. DE VEIMARS.

  1. Négociations relatives à la succession d’Espagne sous Louis XIV. Introduction.