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le seul bien qui lui reste, dans l’intégrité de son caractère ; si elle ne peut pas se justifier en venant elle-même raconter sa vie, moyen le plus simple et le plus sûr pour tout le monde, mais que l’exil lui interdit, faut-il l’abandonner sans défense ou la contraindre à écrire, comme les accusés vulgaires, des factums, des réfutations, des mémoires ? — Non, mille fois non. Il appartient alors à ceux qui savent la vérité de la dire hautement, d’éclairer surtout ce grand nombre de lecteurs plus faibles que méchans, qui, entraînés par la curiosité ou cédant à l’attrait du mystère, prêtent une oreille favorable à toute accusation. Il faut détromper surtout les esprits avides de prétendues révélations politiques ; il faut leur montrer le poison. Un livre a été dirigé contre Mme la duchesse d’Orléans. La conduite politique de cette princesse au 24 février y est complètement dénaturée. C’est à ce point de vue que je m’occuperai de la dernière révolution. Le seul but que je me sois proposé est d’ôter par un récit exact tout crédit à des allégations mal fondées. On a débattu ailleurs, très inutilement selon moi, le degré de sincérité qu’on doit supposer à l’auteur. Est-il ou n’est-il pas de bonne foi ? Rien de plus oiseux, à mon gré, que cette investigation biographique ; je n’ai ni le temps ni le désir de m’y livrer ; je ne prétends ni incriminer ni absoudre des intentions qui, pour ma part, me touchent médiocrement, et qui, en vérité, ne peuvent préoccuper personne. L’attaque subsiste ; qu’importe le motif qui l’a dictée ? Reste cependant un fait pour lequel il est impossible de professer la même indifférence. Des bruits invraisemblables, répandus à dessein, attribuent cette attaque à l’influence d’un parti. C’est encore une nouvelle manœuvre ; on ne peut s’y méprendre, et on doit la signaler. À une époque où l’accord trop rare de toutes les opinions avouables et sincères présente le seul moyen de salut, la seule résistance possible à des doctrines perverses ; lorsqu’il n’y a pas d’autre digue contre le désordre que la conciliation sans artifice, sans subterfuge, sans arrière-pensées, entre toutes les opinions honnêtes, on ne doit pas accueillir légèrement des soupçons vagues et de mensongères rumeurs. Les partis ou plutôt les convictions honorables doivent se ménager, se respecter mutuellement. Je ne croirai jamais que les amis d’un prince dont la jeunesse s’est passée dans l’exil veuillent poursuivre la mère d’un autre prince, comme lui exilé et proscrit ; je ne croirai jamais surtout qu’un tel malheur ne soit pas respecté par ceux qui admirent de près dans la fille de Louis XVI le plus auguste exemple d’une infortune royale injustement subie et héroïquement supportée. Laissons donc à l’auteur de cette incroyable agression sa responsabilité tout entière ; ne cherchons pas à le grandir en attribuant son attaque aux suggestions d’un parti. Cette attaque n’a pas, elle ne peut avoir ce caractère. Rendons-lui seulement de justes actions de graces pour avoir donné l’occasion de révéler des faits qui, sans son