Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 2.djvu/876

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

du jeu de paume, attestant par là l’indépendance des autres votes. Dans ces questions d’influence germanique, l’esprit allemand est aussi enthousiaste que nous l’étions en 89 pour les droits de la révolution. La question du Schleswig, nous le verrons plus d’une fois, a été et est encore pour l’Allemagne une de ces fantaisies ardentes avec lesquelles les démagogues soulèvent les peuples ; c’est elle qui a fait couler le sang de septembre, c’est elle qui a livré aux assassins le brave colonel Auerswald, le brillant et intrépide Lichnowsky.

Ce n’était pas assez d’avoir voté l’annexion du Schleswig au futur empire d’Allemagne ; on réclama bientôt une province de l’ancienne Pologne. Personne n’ignore que le grand-duché de Posen, donné à la Prusse lors du partage de la Pologne en 1772, fait partie des états prussiens sans appartenir à la confédération germanique. Décider que le duché de Posen enverrait ses députés à Francfort, c’était donner à l’empire presqu’un million de Polonais. Une discussion confuse s’éleva sur ce point ; les uns, dans leur patriotisme orgueilleux, ne voulaient abandonner aucune des prétentions germaniques ; les autres, plus soucieux du droit, craignaient de trop mettre à découvert l’ardeur envahissante de l’Allemagne et réclamaient en faveur de la Pologne. M. Leisler (de Nassau) et M. Biedermann (de Leipzig) osèrent même demander le rétablissement du royaume de Pologne dans les limites de 1772. Ce vœu, si populaire en France, ne sonne pas agréablement aux oreilles germaniques. Sans aller jusque-là, M. Venedey proposait seulement de laisser aux Polonais du duché de Posen toute l’indépendance qui leur a été réservée, et de ne pas décréter leur annexion à l’empire. Quelques autres, tels que M. de Gagern et M. de Struve, étonnés cette fois de se trouver d’accord, songeaient surtout aux Allemands qui habitent la province de Posen, et demandaient qu’ils fussent invités à élire des représentans. L’assemblée paraissait fort embarrassée. Devait-elle voter magnanimement le rétablissement de la Pologne ? Devait-elle continuer le cours de ses victoires et s’emparer du duché de Posen avec ses boules blanches, comme elle avait conquis le Schleswig sans coup férir ? Il semble, en vérité, qu’elle ait voulu satisfaire tout le monde. Elle déclara, sur une proposition de M. Robert Blum, que tous les pays de langue allemande seraient représentés à l’assemblée nationale : c’était proclamer le principe fondamental de l’orgueil teutonique et flatter ses plus chimériques prétentions ; mais elle déclara en même temps, sur une proposition de M. de Struve, que le devoir le plus saint du peuple allemand était de rétablir la Pologne. Comprenne qui pourra ce singulier amalgame ! L’assemblée elle-même ne paraissait pas savoir très bien ce qu’elle avait voté en acceptant la vague phraséologie de Robert Blum M. Mittermaier lui expliqua son vote. L’assemblée avait décidé que la Prusse proprement dite, cette province dont Kœnigsberg