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applaudi, et, quand il retourne à sa place, on ne sait s’il a parlé pour ou contre. M. Arneth, député de Vienne, attaque résolûment le projet, qui est défendu avec beaucoup de chaleur par un autre député autrichien, M. Reitter (de Prague). Voici encore un député viennois, M. le docteur Wiesner, qui se déclare contre les deux paragraphes ; M. Wiesner, en cette occasion, se sépare de la gauche, dont il est un des plus ridicules coryphées, et il eût mille fois mieux valu pour l’Autriche que M. Wiesner ne lui apportât pas le dangereux secours d’une si burlesque éloquence. La parole est à un des rapporteurs de la commission, M. George Waitz, qui prononce, au nom des professeurs teutomanes, un discours plein de vigueur et d’entraînement. Si le sens politique manque trop souvent à ce parti, le talent ne lui manque pas ; cette passion même, qui aveugle leur esprit, double les ressources de leur parole. Le discours de M. Waitz est un énergique plaidoyer qui s’adresse avec art aux plus vives passions de l’Allemagne. « C’est le malheur de ce pays, s’écrie M. Waitz, de n’avoir sur ses frontières qu’une situation indécise et flottante ; il faut en finir une bonne fois, il faut trancher hardiment dans le vif, et nous débarrasser des obstacles qui, à chaque pas nous arrêtent. Il ne s’agit pas seulement de l’Autriche, il s’agit aussi de la Prusse et de ses rapports avec, le duché de Posen, il s’agit du duché de Schleswig, du duché de Limbourg, du grand-duché de Luxembourg, et une décision énergique, une décision générale, à laquelle aucun pays allemand ne devra se soustraire, peut seule donner à l’Allemagne le solide terrain qu’il lui faut pour y élever l’empire. D’ailleurs, le temps n’est-il pas venu où les nationalités se reconstituent, où les élémens communs se rapprochent et se dégagent de tout élément étranger ? L’Autriche, chez qui les Slaves forment la majorité, a été représentée souvent comme un empire slave, et de fait il y a long-temps qu’elle a manqué à sa mission, qui était de porter et de faire triompher en Orient la supériorité de l’esprit germanique. En présence de ce mouvement des nationalités, ajoute M. Waitz, l’Autriche ne peut durer long-temps : que les Slaves veuillent la conserver, je le comprend sans peine, car ils y seraient bientôt les maîtres ; mais la Hongrie et la Lombardie ont un intérêt bien différent, et tôt ou tard l’Autriche sera infailliblement disloquée. Dans la prévision d’un tel événement, il n’y a pour nous que deux alternatives : ou bien il faut que l’Autriche allemande soit tout entière et exclusivement comprise dans l’empire d’Allemagne, ou bien il faut qu’elle appartienne toute et exclusivement à la monarchie autrichienne. Ce second cas est impossible, car l’Autriche allemande n’a pas le droit de se séparer de l’Allemagne ; mais, lors même que l’Autriche préférerait ce dernier parti, nous ferions ce sacrifice, nous le ferions avec douleur, bien persuadés que nos frères reviendraient bientôt à nous. » Voilà le résumé du discours