Je le sais, et c’est pourquoi je ne marche qu’avec la vie de plusieurs d’entre vous dans les mains.
Assassin !
Tu te trompes, Baisemain, je n’assassine pas, et j’y ai quelque mérite quand je vois ta face et quand j’entends tes discours. Sais-tu ce qui te sauve ? C’est qu’en t’écoutant je commence à croire en Dieu et à lui demander pardon. Je ne veux plus me souiller du sang d’aucun homme, pas même du tien, misérable ! Mais que personne ne porte la main sur moi !
Cessons ces bravades et ces menaces. Nous sommes ici pour donner nos avis au consul, et pour les donner en liberté.
J’ai cédé à un emportement qu’on trouvera naturel. Je m’en excuse.
Je prie aussi le consul de m’excuser.
Dépose tes armes, ne crains rien ; je ne partage point tes opinions, mais tu as le droit de les exprimer.
Je place ma liberté sous ta protection et sous celle du commandant de la force ouvrière : quand tu m’enverras devant les juges, j’irai.
Au nom de la république et de la fraternité, réconciliez-vous.
Soit !
Il n’y a point de haine dans mon cœur. (Ils se donnent la main.)
Ô touchant exemple de candeur républicaine ! Le mutuel pardon que s’accordent devant nous deux adversaires généreux m’encourage à proposer au conseil un grand acte de réparation sociale. Cet acte ferait couler bien des larmes heureuses. Il suffirait pour illustrer et pour sanctifier à jamais dans l’histoire la part que nous avons prise au gouvernement de notre pays.
Quel pot de crème au sang va-t-il nous servir ?
Citoyens, en même temps que nous sommes sévères et implacables pour les fauteurs du despotisme et de la superstition, et que nous poursuivons par le fer et par le feu ce crime des crimes, sachons prouver au monde que nous croyons à la bonté, à l’excellence de la nature humaine. À mesure que la justice nous enlève des citoyens et des frères, demandons à la clémence, ou plutôt à cette même justice, de nous en donner d’autres. Il existe dans les prisons, dans les