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sauf un groupe de M. Fenchères, le Cavalier arabe, destiné à la décoration du pont d’Iéna. — C’est une fougueuse imagination que celle de cette centauresse emportant en croupe son jeune amant. Le sujet surprend par son étrangeté, mais ne manque pas de charme. M. Courtet a su proportionner le type du quadrupède à la grace de la femme ; on se demande seulement l’explication du mouvement forcé avec lequel cette femme-jument attire le faune à ses lèvres.

Dans quelle catégorie placer le groupe d’Andromède de M. Fromanger ? Est-ce parmi les hommes, est-ce parmi les bêtes ? Il y a des uns et des autres. M. Fromanger annonce qu’il a voulu faire du style Louis XIV. Il y a mieux à choisir pourtant quand on veut imiter. La Chasse au renard, l’Etude de gibier, de M. Mène, sont des morceaux exécutés avec une extrême finesse. M. Mène est le Miéris de la sculpture d’animaux. Ses chiens, ses chèvres, ses chevaux, ont toutes leurs soies et tous leurs crins comptés ; leurs pattes et leurs pieds sont d’une ténuité vraiment aristocratique. J’avoue que je leur préfère de beaucoup les plâtres de M. Emmanuel Fremiet. M. Fremiet n’expose que depuis deux ans, et déjà il est l’émule, l’égal de M. Barye. M. Fremiet possède à un haut degré le coup d’œil prompt et sûr nécessaire pour saisir le mouvement des animaux, qui ne posent pas, comme on sait, et l’aptitude toute spéciale qui fait reproduire leurs allures pour ainsi dire prises à la volée. Voyez comme cette Famille de petits chats tête avec avidité, tandis que la mère, étendue sur le flanc, en quelque sorte aplatie sur le sol avec l’incomparable souplesse propre à la race féline, les surveille de côté d’un œil à moitié endormi. Ce Héron mélancolique, qui médite, le col enfoncé dans son jabot, avec tant de gravité, est un des morceaux les plus finis qui se puissent voir. M. Fremiet modèle avec précision et en même temps avec une grande largeur. Le grand Chien matador qui cherche à arracher le bandage dont on a entouré sa patte blessée est d’une grande vérité de pose et d’une fort belle exécution. Les masses sont indiquées savamment, et l’artiste sait se garder de la minutie des détails à laquelle on se laisse entraîner trop fréquemment ; c’est le défaut d’un autre sculpteur de bêtes, M. Delabrierre : le Dernier pas, Chasse au cerf, est néanmoins un morceau recommandable. Enfin, M. Vechte mérite une mention toute spéciale pour ces deux coupes en argent repoussé, qui, par le savant dessin et le fini de l’exécution, peuvent soutenir la comparaison avec tout ce que les ciseleurs florentins ont laissé de plus parfait dans ce genre.

Après avoir parcouru cette série d’ouvrages qui, s’ils ne sont pas tous également remarquables, témoignent d’une incontestable habileté de mise en œuvre, arrêtez-vous devant une petite figure en bronze qui s’annonce sous le titre de Souvenir d’enfance. Ce n’est qu’une