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contre la France, il lui fallait le concours de l’Angleterre. Charles II et Jacques II, occupés et affaiblis par leurs querelles avec le parlement, avaient retiré le poids de l’Angleterre du règlement des affaires continentales ; bien plus, par un traité secret sur lequel M. Macaulay a jeté de curieuses lumières, le traité de Douvres, négocié par la gracieuse Henriette d’Orléans, ils avaient, pour des subsides et des promesses de secours, si leur couronne était menacée au dedans, asservi leur politique étrangère à celle de Louis XIV. Jacques II, plus fier que son frère, avait hésité avant d’accepter ce honteux vasselage ; il s’y soumit bientôt avec emportement, ajournant toute pensée de politique extérieure indépendante jusqu’au moment où il aurait établi son autorité royale sur des fondemens inébranlables. La politique de Louis XIV, dont M. Macaulay a si bien suivi tous les pas dans les dépêches mêmes des ambassadeurs français, fut de perpétuer ces divisions des rois et des parlemens, qui annulaient l’influence anglaise sur le continent. Lorsque la cour lui résistait, il faisait des avances aux whigs, qui s’entendaient avec ses ambassadeurs, comme nous avons vu, de nos jours, en France, les radicaux servir contre un gouvernement français la politique et les agens de lord Palmerston. Louis XIV avait des stipendiés parmi les ministres de Jacques, mais le grand patriote Algernon Sidney figurait aussi parmi ses pensionnaires. Guillaume voyait avec amertume cet asservissement des forces de l’Angleterre aux vues de la France ; il patientait, lui aussi, dans l’espoir que cette situation finirait avec Jacques II, et que l’Angleterre serait alors nécessairement englobée dans ses combinaisons européennes. Quand il vit un prince de Galles entre l’Angleterre et ses desseins, il ne balança plus. Il se montra disposé à répondre aux invitations qui l’appelaient en Angleterre, il demanda seulement que ces invitations fussent formulées en un acte signé d’un certain nombre de personnages importans. Halifax se tint à l’écart ; mais les comtes de Devonshire et de Shrewsbury, lord Danby, un des chefs les plus remuans des tories, qui avait été ministre prépondérant de Charles II, l’évêque de Londres Compton, d’autres seigneurs, souscrivirent la lettre que demandait le prince d’Orange. Guillaume partit avec des troupes après avoir lancé un manifeste où étaient résumés tous les griefs des Anglais contre le gouvernement de Jacques II et où il déclarait qu’appelé par plusieurs lords spirituels et temporels, il venait demander la convocation d’un parlement légal et libre. À peine débarqué, il fut bientôt entouré des chefs politiques les plus considérables. Jacques II, abandonné par sa propre fille, la princesse Anne, s’enfuit. Arrêté d’abord par le peuple, il s’échappa encore, laissant le gouvernement vide et le parlement maître de terminer en vainqueur la longue lutte des privilèges populaires et de la prérogative royale.

J’ai seulement indiqué la marche de ces événemens ; il faut en lire