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est aujourd’hui parcourue par les troupeaux des colons, et déjà les pâturages y ont été assez exploités pour que les émigrans jettent un regard de convoitise vers les terres inconnues qui s’étendent au nord-ouest de Sydney, c’est-à-dire vers les îles malaises et vers la mer des Indes.

En 1844 et 1845, M. Sturt s’est avancé au centre du continent de l’Australie plus loin qu’aucun de ses prédécesseurs. Il y a beaucoup souffert, et, comme il n’y a reconnu que des terres arides, les colons australiens ont méconnu son dévouement et lui ont montré une indifférence qui est de l’ingratitude ; mais la science, qui a recueilli ses observations, porte témoignage en sa faveur. Pendant une année entière, il a erré dans un affreux désert ; il y a éprouvé 66 degrés de chaleur, — l’eau bouillante étant à 112 degrés, — il a dû se creuser une habitation sous terre pour trouver une température supportable ; il n’a aperçu d’autre verdure que le triste feuillage des pins. La chaleur était si intense, que la semelle des chaussures du voyageur brûlait sur le sable, et que les chiens perdaient, en marchant, la peau de leurs pattes.

MM. Leichardt et Mitchell ont attaché leurs noms aux voyages d’exploration vers le nord. En suivant les côtes, à une petite distance dans l’intérieur, M Leichardt, après avoir longé le détroit de Torrès et tourné autour du golfe de Carpentarie, est arrivé à Port-Essington. Sur sa route, il a découvert de riantes vallées ; il a traversé une multitude de cours d’eau, dont aucun ne vient de loin dans l’intérieur. Ses découvertes, précieuses aux yeux des colons, qui sont continuellement à la recherche de nouveaux pâturages, ont moins d’importance au point de vue géographique. M. Mitchell, moins heureux que le docteur Leichardt, puisqu’il n’a reconnu qu’une médiocre étendue de terres nouvelles propres à l’élève des bestiaux, a rendu, dans son dernier voyage, plus de services à la science, car il a pénétré plus avant dans l’intérieur. Son but était de chercher une rivière qui, faisant au nord l’office que la Darling et La Morrumbidgy font au sud, conduisit les marchandises de Sydney et des districts environnans sur les côtes septentrionales de l’Australie. L’existence d’une telle rivière aurait un grand intérêt pour la colonie de la Nouvelle-Galles du Sud. L’exportation de la laine donne lieu à un commerce très important dans cette partie des possessions britanniques. En 1846, il est sorti des ports de la Nouvelle-Galles du Sud seize millions quatre cent soixante-dix-neuf mille cinq cent vingt livres de laine provenant exclusivement des pâturages de cette colonie. En outre, elle produit beaucoup de chevaux qu’on envoie, chaque année, dans l’inde, pour la remonte de la cavalerie anglaise. Or, ce commerce est continuellement entravé par les difficultés de la navigation. En sortant du port de Sdney pour gagner la mer des Indes, les navires ont, pour monter vers le nord, à suivre une côte hérissée d’écueils ; le détroit de Torrès, qu’il leur faut traverser avant d’arriver à Singapoure, est très périlleux ; ses eaux,’battues par les vents des deux océans qui se rencontrent, sont le théâtre de naufrages très fréquens. Quoi qu’il arrive, la traversée est toujours pénible et longue ; les marchandises s’avarient, la santé des marins s’altère, ébranlée par des travaux excessifs : aussi les armemens sont coûteux ; le pris des assurances est élevé ; les profits sont faibles et souvent nuls.

Tracer une route par terre, entre Sydney et la côte septentrionale, de manière à éviter les dépenses, les périls et les longueurs de la navigation à travers