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le partage de la pologne.

formule, qui, pour quelques-uns d’entre eux du moins, prenait en cette circonstance un grand air de vérité. Le vieil ambassadeur de Russie, le comte Kayserling alors mourant, fit remettre un discours écrit ; il recommandait Poniatowski ; il fut obéi. « Nous voulons le stolnick Litowski (le pannetier de Lithuanie), s’écriait-on de toutes parts ; il sera notre roi !… » Il le fut à l’unanimité. Le stolnick Poniatowski devint Stanislas-Auguste ; Varsovie le reçut avec joie, et, malgré la présence des étrangers, ce choix obtint l’approbation publique. On y voyait une trêve avec les Russes ; c’était là la nécessité du moment, et il est bien certain qu’à cette époque aucun parti, pas même celui de l’opposition, ne traita l’élection d’illégale.

Stanislas débuta par affecter une grande modération ; il refusa un trop brillant accueil, des fêtes trop somptueuses ; mais la municipalité de Varsovie le contraignit à les accepter. En un mot, ce ne furent alors qu’effusions d’amour, témoignages de dévouement de la bourgeoisie des villes, de la haute et petite noblesse[1]. Les magnats exilés rentrèrent tous à la faveur d’une amnistie. Seul, l’intrépide Radziwil la dédaigna et préféra l’exil. En revanche, le comte Braniçki l’accepta. Il reconnut le nouveau roi ; il lui fit sa soumission par écrit avec dignité, quoique avec respect. Toutefois le grand-général ne parut point à la cour de son heureux beau-frère ; il se retira noblement dans son château de Bialistock, chargé d’années, léger d’idées politiques, et, bien qu’octogénaire, jeune encore par la crédulité, l’espérance et l’illusion.

Ainsi commença le règne de Stanislas-Auguste. L’enthousiasme qu’il inspira d’abord, comme tout ce qui est nouveau, ne fut pas éternel. Il dura cependant près d’une année, terme bien long pour les Français du Nord !…


Alexis de Saint-Priest.

(La seconde partie au prochain n°.)
  1. Archives des affaires étrangères.