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sans nécessité, un tableau qui était, déjà bien assez sombre. Il est permis en effet de croire que le découvert final de 1849 ne montera pas à 184 millions. Toutes les fois que le travail renaît dans les ateliers et que le commerce reprend un peu d’activité, les impôts de consommation reçoivent leur part de ce mouvement ascendant, si passager qu’il soit, de la richesse. Le produit des taxes indirectes excédera donc, il faut l’espérer, les évaluations de M. le ministre des finances, tant pour l’année 1850 que pour l’année 1849.

Admettons cependant, pour raisonner d’après les mêmes bases, des hypothèses qui se rapprochent, à tout prendre, de la réalité, Faisons, comme M. Passy lui-même, deux parts du découvert, le passé qui est consommé ou qui va l’être, et cet avenir immédiat sur lequel peuvent s’exercer les combinaisons financières. Des 550 millions qui représentent, suivant lui, le déficit antérieur au 1er janvier 1850, M. le ministre des finances laisse 350 millions à la charge de la dette flottante ; le reste, il veut être autorisé à le demander à l’emprunt, en négociant jusqu’à concurrence de cette somme des rentes 5 pour 100. Une dette flottante de 4 à 500 millions, dont la plus grande partie représente des fonds à peu près immobilisés n’aurait assurément rien d’exagéré pour la France ; mais on peut admettre un emprunt qui la réduirait à 350 millions, surtout quand on songe qu’elle ne tardera pas à s’enfler des dépenses qu’exigeront encore pendant quelque temps les travaux extraordinaires, au chiffre d’environ 100 millions par année.

Reste à combler la différence considérable que semble présenter, avec un caractère de permanence pour l’avenir, l’évaluation des recettes comparée à l’évaluation des dépenses. M. le ministre des finances propose de recourir aux moyens suivans :

« 1° À la création d’impôts destinés à assurer au trésor les complémens de ressources dont il a maintenant besoin ;

« 2° À la mise en recette comme en dépense des fonds de l’amortissement, en les limitant aux seules dotations par l’accumulation des rentes rachetées ou provenant de la consolidation des réserves annuelles ;

« 3° À la constitution de moyens de service spéciaux, applicables uniquement aux dépenses des travaux extraordinaires. »

Sans doute, la situation de nos finances est telle que l’application d’un seul remède, si héroïque qu’il fût, ne les sauverait pas du naufrage. Il y faut l’emploi énergique et simultané de toutes les ressources : de l’économie, du crédit et de l’impôt. M. le ministre des finances paraissant vouloir mettre un intervalle de deux mois entre la publicité donnée à son exposé et la publication du budget de 1850, on peut difficilement juger de la sévérité avec laquelle ont été réglées les dépenses ; mais je suis disposé à croire, pour mon compte, que, sous la pression des circonstances, tout ce que l’on devait faire a été fait.