Nous n’avons pas besoin de rappeler ici les vicissitudes de cette affaire l’importance et la multiplicité des intérêts qui s’y rattachent. Arrivons aux conclusions du rapport ; La commission, d’accord avec le gouvernement s’est arrêtée aux bases suivantes : — le chemin de fer de Paris à Avignon sera concédé directement à une compagnie ; cette compagnie prendra l’engagement d’achever les travaux sur toute : la ligne : elle recevra en échange le droit d’exploiter pendant quatre-vingt-dix neuf ans ; elle recevra, en outre, la garantie d’un minimum d’intérêt de 5 pour 100 sur un capital de 260 millions, évalué à forfait. Les années au-dessus de 8 pour 100 seront partagés entre l’état et la compagnie. Après quinze années d’exploitation, l’état aura la faculté de racheter la ligne à prix convenu. Telles sont les conditions principales. Ces conditions modifient sur plusieurs points le projet primitif du gouvernement : elles ont principalement pour effet de supprimer certaines concessions onéreuses que M. Lacrosse avait proposées, et qui avaient soulevé à juste titre de vives réclamations. Dans le projet de M. Lacrosse, l’état se chargeait de la traversée de Lyon ; la commission a rejeté cette clause, qui laissait trop de marge à l’imprévu, et, en même temps ; elle a augmenté d’un chiffre proportionnel le capital, dont l’intérêt est garanti. La commission a également supprimé cette subvention de 15 500 000 francs, que le gouvernement offrait à titre de prime aux actionnaires de Lyon, et d’Avignon, de Cette et de Fampoux, afin de, leur donner l’occasion de recouvrer une partie de leurs cautionnemens ; en devenant les souscripteurs de la nouvelle entreprise. On a pensé avec raison que cette clause faisait jouer au gouvernement un rôle peu digne et peu équitable. En effet, s’il croit que les compagnies frappées de déchéance ont mérité leur sort, pourquoi leur rendrait-il leurs cautionnemens ? S’il reconnaît, au contraire, qu’il a contribué lui-même à faire naître les illusions qui, ont causé leur ruine, pourquoi hésiterait-il à rembourser directement et intégralement des sommes dont la possession doit gêner sa conscience ?
Les adversaires du projet de loi n’ont pas attendu les débats de la tribune pour l’attaquer, ils lui reprochent de sacrifier au monopole d’une compagnie les intérêts du trésor et ceux des particuliers. Examinons. Pour le trésor, il y avait à opter entre deux systèmes : l’exécution par l’état ou un appel à l’industrie privée. L’exécution par l’état, qui peut y songer sérieusement dans la situation actuelle de nos finances ? Ce système sera cependant soutenu à la tribune. Nous verrons sur quels raisonnemens on l’appuiera. Jusque-là, nous croyons que le gouvernement et la commission, en faisant appel à l’industrie privée, ont adopté la seule voie qui fût praticable dans ce temps-ci. Loin de s’en plaindre, on devrait s’estimer heureux d’apprendre, par le rapport de M. Vitet : qu’il y a en ce moment des capitaux qu’une pareille aventure n’effraie pas, et qui acceptent, à leurs risques et périls, un fardeau sous lequel l’état succomberait.
Mais, dit-on, le fardeau n’est pas si lourd que vous le prétendez ; avec l’abandon des travaux faits, avec un bail de quatre-vingt-dix-neuf ans, avec un minimum d’intérêt de 5 pour 100, la compagnie concessionnaire n’est pas à plaindre ; le seul damer,c’est qu’elle fasse de trop beaux bénéfices ! Voilà le langage des gens qui ne supportent pas qu’une compagnie puisse se tirer d’affaire, et qui croient que l’intérêt de l’état est de ruiner tous ses cliens. Nous avons entendu ce langage sous la monarchie, et l’on sait les beaux résultats qu’il a