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Trois cents hommes d’Infanterie soutiendront trois colonnes de cavalerie ; le centre est commandé par le colonel Tartas du 4e. On s’ébranle, et à ce moment un coup de fusil part : c’est une vedette que nos éclaireurs n’ont pu surprendre. L’Arabe gravit au galop la colline, agitant son burnous. Au même instant, les tambours des réguliers battent la générale, un frémissement court nos rangs. La cavalerie prend le trot ; l’infanterie oublie ses marches forcées, elle suit au pas de course, et, du sommet de la colline, on voit les deux bataillons réguliers, qui n’ont pu atteindre la crête opposée, s’arrêter à mi-côte. Le sabre est en main, les chevaux sont au galop, le colonel Tartas en tête ; un feu de deux rangs part, quelques-uns tombent, mais l’avalanche a brisé l’obstacle, et de tous côtés les fantassins sont percés de coups de sabre. Des cavaliers pourtant cherchent à s’enfuir les uns sur la gauche, d’autres droit devant eux. Ceux dont les chevaux tiennent encore les poursuivent ; et le caïd Osman roule avec son cheval, frappé à la tête. M. de Caulaincourt, admirablement monté, continue la course : il tue un cavalier de l’émir, mais, séparé, par un pli de terrain, de ses chasseurs qu’il a devancés, il est entouré d’ennemis. Sans perdre son sang-froid, il lance son cheval, se fait jour le sabre en main et, au moment où il va rejoindre sa croupe, un Arabe débouchant d’une clairière lui tire à bout portant un coup de pistolet à hauteur de l’œil. Le cheval continue sa course, l’emmenant vers les chasseurs, qui le reçoivent. Le sang ruisselait, les chairs pendaient ; M. de Caulaincourt avait pourtant sa connaissance. Descendu de cheval, un soldat le prend sur son dos et l’emporte à l’ambulance, en traversant le théâtre du combat, un vrai champ des morts. Cinq cents cadavres étaient étendus dans un étroit espace, presque tous affreusement mutilés par les sabres de nos chasseurs.

Un escarpement rocheux avait arrêté les cavaliers qui s’enfuyaient vers la gauche. Plusieurs mirent pied à terre, et, donnant une saccade à leurs chevaux, franchirent l’obstacle. Un seul longeait au pas cette muraille de rochers. La blancheur et ses vêtemens, la beauté de son harnachement, indiquaient un chef. Le maréchal-des-logis Siquot, un brigadier de chasseurs et le capitaine Cassaignoles se dirigèrent de ce côté. Le terrain était affreux, hérissé d’obstacles. Laboulaye, le brigadier de chasseurs, arrive le premier ; comme la tête de son cheval touche la croupe du cheval de l’Arabe, le cavalier se retourne avec le plus grand calme, l’ajuste, et l’étend raide mort. À ce moment, Siquot le joint, le blesse ; mais un coup de pistolet lui traverse le bras gauche, et va tuer le cheval du capitaine Cassaignoles, qui se trouvait sur la pente un peu au-dessous. Ce grand cavalier se dresse alors sur ses étriers, et frappe Siquot à la tête de la crosse massive de son pistolet, quand le brigadier Gérard des chasseurs, arrivant par la crête., lui envoie