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puis une troisième, que dis-je ? une vingtième, une centième, les forces de la nature asservie, ce qui donne naissance aux subdivisions de l’industrie manufacturière et de l’industrie des transports ; c’est ainsi que tes objets divers s’apprêtent pour notre usage, et qu’ils se placent sous la main du consommateur.

La division du travail est une autre circonstance très favorable au développement de la richesse. À peu près comme les machines, elle donne le moyen de faire produire beaucoup plus à une même quantité d’hommes. L’utilité de la division du travail tient à plusieurs causes qui ont été très bien observées et analysées[1], et dans le nombre desquelles je ne citerai ici que deux : l’une, c’est qu’en répétant, constamment une même opération, les muscles et l’esprit de l’homme se façonnent à la faire beaucoup mieux et beaucoup plus vite ; l’autre, c’est que la division du travail ou le partage d’une fabrication en un grand nombre d’opérations, presque toutes fort simples, facilite et appelle l’emploi des machines elles-mêmes. Mais, pour être avantageuse et même possible, la division du travail suppose la grande fabrication, et celle-ci exige que les matières premières s’offrent par grands approvisionnemens.

Il y a un mot qui embrasse, et les appareils de toute sorte à l’aide desquels l’homme s’assure d’une manière de plus en plus étendue et fructueuse la collaboration de la nature, et les matières destinées à être travaillées, dont de grands approvisionnemens sont, à peu près dans tous les cas, indispensables à la division du travail : c’est le capital. Le capital de la société est l’ensemble des instrumens à l’aide desquels le travail s’opère, et des matières sur lesquelles l’industrie s’exerce, soit qu’elles se trouvent à l’état brut, soient qu’elles aient été déjà plus ou moins élaborées, jusqu’à ce qu’elles soient parvenues sur le comptoir du marchand, d’où elles passent aux mains du consommateur. Le capital est cela et n’est que cela, quoique l’usage où l’on est de l’évaluer et de l’énoncer en argent ou en or fasse croire aux hommes qui observent peu que tout capital est une certaine quantité de pièces de monnaie.

Soit qu’il se présente sous la forme d’appareils par le moyen desquels les forces de la nature se joignent ou se substituent à celles de l’homme, soit qu’il s’offre à l’état de vastes approvisionnemens de matières premières qui permettent la division du travail, le capital est une source de puissance pour le labeur humain. Or, à mesure que le travail (les hommes a été plus productif, il a été possible de relâcher

  1. De curieux développemens ont été donnés sur ce sujet par Adam Smith (Richesse des Nations), J.-B. Say (Traité et Cours d’Économie politique), Senior (Économie politique), Wakefield (édition spéciale d’Adam Smith ), J.-S. Mill (Principes d’Économie politique), et par divers autres auteurs.