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du congrès de Vienne concernant les affaires de la Suisse, ne font dépendre la neutralité helvétique de la lettre du pacte de 1815. En revanche, les puissances et la Suisse ont un égal intérêt à ce que la constitution fédérale n’établisse pas un pouvoir central trop fort et enclin par là même à échanger contre une politique active l’ancienne politique suisse, la politique de neutralité.

L’on se demande si la nouvelle constitution n’a pas trop favorisé l’élément unitaire en ce qui concerne la marche des affaires intérieures ; mais un conseil fédéral, pouvoir exécutif, composé de membres de différens cantons, renouvelé tous les trois ans, obligé de soumettre presque tous ses actes, quelque peu importuns qu’ils soient, aux deux sections de l’assemblée fédérale, ne pouvant enfin lever à lui seul plus de deux mille hommes de troupes et les garder sur pied au-delà de trois semaines ; un pouvoir exécutif de cette nature, disons-nous, est loin d’être en mesure de changer le système politique de la Suisse vis-à-vis de l’Europe.

Le projet de constitution a été soumis à la votation du peuple et accepté par une forte majorité. Les populations des cantons du ci-devant Sonderbund n’y ont opposé aucune résistance, et se sont bornées à quelques protestations, quoique le projet leur fût souverainement antipathique, surtout comme témoignage et résultat de la victoire remportée sur eux. Une opposition plus active a été faite au projet par le parti ultra-radical de quelques cantons, en particulier par celui de Berne, qui avait espéré donner à la Suisse une constitution unitaire, et qui pressentait que le nouvel ordre de choses déjouerait ses desseins. Un de ses chefs disait très naïvement dans le grand-conseil de Berne que « cette constitution n’était qu’une nouvelle alliance des maîtres, un nouveau covenant de Stanz qui ne donnait pas de garanties au peuple. »

La diète déclara la nouvelle constitution fédérale acceptée le 12 septembre 1848. Elle avait montré une habileté pleine de réserve dans son projet de pacte ; elle s’en écarta en laissant aux cantons le soin de délimiter les collèges fédéraux pour l’élection des membres du conseil national. Aussi vit-on presque partout les gouvernemens cantonaux composer les collèges de manière à en exclure autant que possible l’opposition conservatrice. Berne fut choisi pour siège des autorités fédérales. Ce canton avait beaucoup contribué par sa politique radicale à la crise violente de 1847 ; un des fruits de la victoire lui échut en partage. Son ancien rival, le canton de Zurich, lui fit concurrence, mais en vain, car il avait manqué à sa mission naturelle de médiation. D’ailleurs Berne était plus propre à servir de point de réunion entre la Suisse romande et la Suisse allemande.

Depuis l’acceptation de la constitution, les conseils fédéraux ont successivement délibéré, d’abord les lois nécessaires pour mettre la constitution même en vigueur, ensuite celles qui concernent l’organisation