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fédérale à chaque session ordinaire. Il y a un tribunal fédéral pour l’administration de la justice en matière fédérale ; il y a de plus un jury pour les affaires pénales. »

Ce résumé des dispositions de la nouvelle constitution fédérale prouve clairement que, d’un côté, la diète a respecté la base de l’acte de médiation, que, de l’autre, la constitution des États-Unis d’Amérique a exercé assez d’influence sur les législateurs suisses. Prise en elle-même, cette constitution est un composé de plusieurs élémens très distincts. Une simple confédération d’états souverains est reconnue dans la clause qui déclare que toute la souveraineté, — en tant qu’elle n’est pas expressément limitée par la constitution fédérale, — appartient aux cantons. Aussi chaque canton garde sa législation, son gouvernement, sa justice civile et pénale, son système d’impôts et d’instruction publique, ses rapports particuliers entre l’église et l’état, la libre disposition de ses milices. La confédération n’a même pas osé s’attribuer la rédaction d’un code de commerce obligatoire pour toute la Suisse. Voilà pour l’élément cantonal. — L’élément fédératif est en partie représenté par le conseil des états ; enfin l’élément unitaire a son expression dans le conseil national. — Ce n’est pas à tort qu’on a reproché à la constitution d’avoir créé ou trop d’autorités ou trop peu d’affaires. Comme elle a été basée sur plusieurs élémens différens, il est évident que chacune des tendances qu’on croyait équilibrer travaillera à s’assurer tôt ou tard le premier rang. Déjà même on voit recommencer les luttes. Il faut espérer cependant que force restera au bon sens national.

Chose curieuse, c’est le parti ultra-radical qui a donné le signal de la guerre contre la constitution. Ce parti, obéissant à ses tendances naturelles, avait poussé à l’unité ; mais, comme la marche des nouvelles autorités fédérales lui est contraire, il a fait une de ces volte-face que le radicalisme opère avec tant de facilité : il s’est fait le champion de la souveraineté cantonale ; à Genève et dans le canton de Vaud, il s’efforce de revendiquer pour les grands conseils cantonaux la discussion des questions fédérales. Si l’on tient compte de la situation générale de 1848, on trouvera néanmoins que la diète a montré beaucoup de modération, et a profité, sous bien des rapports, des expériences du passé. Cette constitution a été l’ancre de salut pour la Suisse pendant les deux dernières années, et elle le sera sans doute pendant les années qui vont suivre. Qu’on se représente la direction des affaires générales de 1849 et de 1850 entre les mains de l’ancien directoire, de ce gouvernement radical de Berne qui a fait une opposition de plus en plus hostile à la marche modérée du nouveau conseil fédéral, et l’on comprendra bien vite que la question des réfugiés aurait amené, de grands dangers pour la Suisse, de grands embarras pour ses voisins. Ni les articles du traité de Paris du 20 novembre 1815, ni la déclaration