Page:Revue des Deux Mondes - 1851 - tome 10.djvu/265

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à Orléansville et à Milianah, il trouva Téniet-el-Had et Tiaret, où les généraux Lamoricière et Changarnier furent chargés d’établir deux autres postes permanens, précisément aux environs de Tegdempt et de Thaza, détruits deux ans auparavant.

C’est ainsi que toute l’Algérie fut bientôt couverte de postes militaires sur les points stratégiques les plus importans. Partout où Abd-el-Kader voulut désormais tenter un soulèvement outre les colonnes qui le poursuivaient, il vint toujours se heurter contre quel poste qui le repoussaient comme au autant d’angles saillans. Pour relier ces postes entre eux, il fallut percer des routes, jeter des ponts sur les ravins qui sillonnent en tous sens le territoire de l’Algérie : notre infatigable armée suffit à tout, aux travaux comme aux combats. À travers le soleil et la pluie, souvent après des marches forcées il fallait prendre la pioche où la truelle, construire des blockaus, assainir des marécages, préparer partout les voies à la colonisation attardée. C’est par là surtout que notre armée d’Afrique fut admirable sous le commandement de son illustre chef. Rien ne put rebuter le soldat sous un tel général, ni les privations, ni les fatigues, ni les labeurs ; nous ne parlons pas du danger c’était une prime offerte à son courage.

Cette fois la guerre était bien finie ; nous dominions la plaine et la montagne Après avoir balayé la vallée du Chéliff, nous avions organisé le Dahra et l’Ouérenséris, maintenus par nos colonnes et par nos postes militaires. Enfin Abd-el-Kader, chassé du désert, voyait sa smala prise et ses réguliers détruits. Poursuivi dans la province d’Oran d’où il se disposait à gagner la frontière du Maroc, il était rejeté une fois encore vers le désert, du côté d’Angad, derrière Tlemcen et Sebaou. C’est de là qu’il manda à Sidi-Embareck de venir le rejoindre avec son dernier contingent ; mais il ne tarda pas à apprendre la destruction de ce contingent et la mort de son khalifat. Alors, courbant la tête, mais interrogeant encore l’avenir, il passa la frontière du Maroc. C’était la fin de la campagne de 1843. L’Algérie était conquise.


V. – LA GUERRE EN KABYLIE.

Les trois campagnes que nous venons de raconter avaient valu au général Bugeaud le bâton de maréchal de France. Lorsqu’il prit le gouvernement de l’Algérie, il y trouva vingt sept mille Européens ; il y en avait soixante-cinq mille trois ans après, et ce nombre allait désormais rapidement s’accroître Notre domination dans l’Algérie assurée désormais contre toutes les entreprises des indigènes, la sécurité la plus profonde régnant autour de nos centres de division et de subdivision, dix-neuf routes percées, vingt-deux nouveaux centres de population installés, telle fut l’œuvre de ces trois années.