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Page:Revue des Deux Mondes - 1851 - tome 11.djvu/1138

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douanière avec lesquels elle menaçait déjà le Zollverein prussien. On sait qu’en dehors du Zollverein il existe une autre union douanière, le Steuerverein, composé des états du nord, qu’on a nommés jadis, les états séparatistes, le Hanovre l’Oldenbourg, etc. Le principal de ces états secondaires, le Hanovre, vient d’entrer dans l’association prussienne, et il a promis d’inviter ses alliés à le suivre. Cette soudaine accession contraire certainement les plans que l’Autriche avait pu former dans sa naissante ambition commerciale ; elle fortifié le Zollverein, qui avait été en danger, et qui la paie au reste assez chèrement. Un proecipuum de trois quarts par tête d’habitant est accordé, au Hanovre, c’est-à-dire que si, dans la répartition des revenus de l’union douanière, il échoit aux états de l’ancien Zollverein un thaler par tête d’habitant, les états de l’ancien Steuerverein recevront un thaler trois quarts. Le traité sera exécutoire à partir du 1er janvier 1854, les conventions du Zollverein n’expirant qu’à la fin de 1853.

En Belgique, la crise est décidément pendante ; le sénat a rejeté, comme nous l’avions prévu, l’impôt sur les successions ; le ministère, soutenu par la couronne, en a tout de suite appelé au pays. La Belgique se prépare à nommer de nouveaux sénateurs, et ces élections ont cela de curieux dans un pays si profondément démocratique, que le choix des candidats est très borné par l’élévation même du cens auquel ils sont astreints. On s’explique difficilement la résolution que le sénat a cru devoir prendre. La chambre des représentans s’était aussi cabrée contre le projet du ministère ; il y avait dans ce projet une formule de serment dont elle ne voulait pas ; le cabinet avait été renversé, et il était revenu faute d’un autre qui le remplaçât. Il avait rapporté son projet modifié ; l’impôt fut ainsi admis par la seconde chambre et sur les successions en ligne directe comme en ligne indirecte. On ne comprend guère que le sénat se soit mis de gaieté de cœur dans une espèce d’antagonisme vis-à-vis des représentans, ni qu’il ait ainsi tenté de culbuter un cabinet auquel on venait de chercher en vain des suppléans : c’est un peu jouer à la crise pour le plaisir de la crise. Nous avons abusé de ce jeu-là chez nous : que nos voisins n’en abusent pas à leur tour. Quelques membres libéraux ont eu des scrupules qui les ont effarouchés d’autres ont pensé que le ministère ne traitait point le sénat avec les égards convenables, et de fait M. Rogier ne ménage peut-être pas assez toutes les susceptibilités personnelles. C’est ainsi que s’est formée la majorité hostile au projet de loi ; mais le fond de cette majorité, c’est toujours le parti catholique qui cherche à prendre de biais les avantages qu’il a perdus, ne les pouvant plus reprendre de front. C’est lui qui s’avance déjà sous tous les prétextes dans l’arène électorale. La Belgique s’est résignée depuis long-temps à vivre entre les deux partis qui se la disputent. M. Frère-Orban les a proclamés lui-même à la tribune comme une sorte d’institution nécessaire. On a vainement essayé d’un gouvernement mixte pour les apaiser ou les dissoudre ; nous n’avons pas beaucoup plus de confiance dans les idées plus estimables que positives d’un écrivain belge, M. Le Pas, qui rêve à son tour une conciliation générale au moyen d’un gouvernement presque éthéré, qui planerait par la vertu de sa sublimité transcendante au-dessus de tous les partis.

Un autre événement de la quinzaine, c’est l’entreprise avortée des Américains sur Cuba. La riche colonie espagnole est toujours menacée de devenir