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liberté. Honorius mourut le 27 août 428, à l’âge de trente-neuf ans, emporté, comme son père, par une hydropisie dans l’espace de quelques mois. Cette mort inattendue prenait au dépourvu tous les calculs d’ambition personnelle. Théodose II en cacha d’abord soigneusement la nouvelle, et, tandis qu’il concentrait en toute hâte des troupes sur la frontière de l’Italie, tandis que ses émissaires partaient pour aller travailler l’esprit des Occidentaux à son profit, il amusait Placidie et les provinces d’Orient par des informations contradictoires ; mais Rome n’avait attendu pour se décider ni l’armée du césar de Constantinople, ni ses envoyés politiques. Honorius n’était pas encore descendu dans le tombeau que le sénat s’emparait des rênes du gouvernement, nommait un empereur de son choix, et donnait le signal d’une réaction complète dans l’état en abolissant le système de lois politiques et religieuses en rigueur depuis le temps de Théodose, et qui portaient le nom de lois catholiques et de lois d’unité. La liberté des cultes, que ce système supprimait, fut de nouveau proclamée ; tous les proscrits, tous les exclus du dernier règne, païens zélés, hérétiques, partisans des usurpateurs qui avaient essayé d’ébranler la maison de Théodose, tous accoururent à la voix du sénat et rentrèrent dans les fonctions dont ils avaient été dépouillés. Le nouvel empereur, nommé Joannès, appartenait lui-même aux rangs des ennemis de cette maison en sa double qualité d’ancien fonctionnaire du tyran Attale et d’hérétique arien.

Ce n’est pas que le choix de Joannès fût mauvais au fond, et le sénat s’était montré habile en s’y arrêtant. Tout le monde s’accordait à reconnaître en lui de grandes qualités : la justice, le désintéressement, la bienveillance pour les personnes, le zèle pour les intérêts publics ; mais c’était un homme de parti, qui avait figuré avec éclat dans la révolte d’Attale. Rentré en grace près d’Honorius, il était parvenu par ses services au poste important de primicier des notaires, ou chef de la secrétairerie d’état. L’Italie, qui penchait habituellement pour le parti du sénat, accueillit le nouveau gouvernement avec faveur ; la Gaule, plus éloignée, plus divisée, ne s’y soumit pas sans résistance ; mais l’Afrique le repoussa résolûment, et répondit aux lettres de Joannès par la proclamation de Valentinien III. Il était aisé de reconnaître là l’influence du comte Bonifacius, et ce fut une mauvaise fortune pour Joannès d’avoir contre lui un tel homme et une telle province. Dans les révolutions de l’empire d’Occident, il fallait toujours compter avec l’Afrique, qui était le principal grenier de l’Italie : tenir Carthage, c’était bloquer Rome ; aussi le nouvel empereur, tout autre soin cessant, envoya une expédition attaquer Bonifacius et réduire Carthage à tout prix. Pour combler les vides que cette expédition laissait dans les forces de l’Italie, il fit des levées en masse ; il appela les esclaves aux armes ; enfin il envoya son curopalate ou maître du palais