que M. Barye s’est décidé à choisir dans les temps héroïques de la Grèce le sujet d’une nouvelle composition. Cependant la manière dont il l’a rendu, l’indépendance qu’il a montrée dans le mouvement des personnages, me donnent à penser que ces niaises déclamations ont été la cause prochaine et non la cause réelle de sa détermination. Le Combat de Thésée contre le Minotaure ne relève d’aucune tradition académique. — Chacun peut voir aux Tuileries comment un statuaire chargé par l’état d’enseigner son art à la jeunesse comprend ce sujet héroïque. L’oeuvre de M. Ramey, insignifiante dans presque toutes ses parties, ridicule dans la tête du minotaure, ne blesse absolument personne par sa hardiesse ou sa nouveauté. Dans cette composition, qui n’a pas dû coûter de longues méditations, l’adversaire de Thésée, étendu sur le dos, se soulève comme un bourgeois réveillé en sursaut, qui se prépare à gronder sa servante. Quant au Thésée, M. Ramey a eu sans doute l’intention de le faire élégant, mais il n’a réussi qu’à le faire maniéré, car le héros, en soulevant sa massue, pose comme un danseur. Mais à quoi bon analyser cette composition ? chacun peut s’en égayer à son aise en traversant le jardin des Tuileries. Je ne connais guère que le Cadmus de Dupaty qui puisse lutter avec le Minotaure de Ramey.
M. Barye, en nous offrant le Combat de Thésée contre le Minotaure, a compris tout l’avantage qu’il y aurait à représenter les deux figures debout. Cette disposition permet, en effet, de donner plus de développement au corps du minotaure, et d’établir un contraste plus frappant entre les membres du monstre et les membres du héros. Le Thésée, plein d’élégance et de noblesse, n’a rien d’apprêté, rien de préconçu dans ses mouvemens. Il agit et ne pose pas. Son corps tout entier est un modèle de beauté. Le torse et les membres expriment à la fois la force et l’énergie ; la tête, empreinte d’une ardeur virile, s’accorde très bien avec le caractère du corps. Il n’y a ni dans le torse, ni dans les membres, ni dans la tête, rien qui rappelle servilement les monumens de l’art antique. Cependant il est facile de voir que M. Barye n’ignore pas le Thésée du Parthénon, et qu’il l’a souvent consulté, car les grandes divisions du torse sont inspirées par l’admirable fragment placé au Musée britannique. En interrogeant ce débris si plein d’enseignemens, M. Barye a usé d’un droit que personne ne peut lui contester. Il a profité de la leçon avec liberté, avec hardiesse ; il s’est souvenu sans copier ; il n’a pas confondu la docilité avec l’impersonnalité. Tout en acceptant les conseils d’un maître illustre, il est demeuré lui-même. C’était la manière la plus sûre, la plus décisive de prouver aux diseurs de lieux communs que, pour s’élever au-dessus de la sculpture de genre, il n’est pas nécessaire d’avoir à sa disposition un bloc de marbre de dix pieds de hauteur. Le Thésée de M. Barye n’a