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preuve unique de sa sollicitude constante pour leur bien-être, par une acceptation pleine et entière des conditions de séparation que les cinq puissances avaient déclarées définitives et immuables. » Le ministre des affaires étrangères, en présentant aux états-généraux le rapport sur l’acceptation du traité, le terminait dans les termes suivans : « La postérité ne se trompera pas sur le véritable caractère des événemens dont les effets ont ébranlé si profondément les Pays-Bas et l’équilibre européen. Ils portent le cachet funeste d’une politique dénuée de principes et ils présagent les catastrophes qui les ont suivis. »

On touchait au dernier acte de ce long drame qu’avait rempli la lutte obstinée du gouvernement hollandais contre la diplomatie de l’Europe. Aussitôt après la réception de la note du 14 mars, plusieurs membres de la conférence voulurent procéder à la signature du traité avec les plénipotentiaires néerlandais, en réservant seulement les articles relatifs à l’indemnité territoriale de la diète allemande, mais la Belgique réclama. Diverses circonstances survinrent alors et retardèrent la reprise des conférences jusqu’au mois de juillet 1838. Ce délai fût fatal à la Hollande. L’acceptation de Guillaume avait tiré la Belgique de cet heureux statu quo dont insensiblement elle avait oublié le caractère provisoire. La Belgique s’était habituée à la jouissance intégrale du Luxembourg et du Limbourg, à l’absence de tout péage sur l’Escaut ; au non-paiement des arrérages qui avaient été mis à sa charge. Elle réclamait donc à la fois contre les stipulations territoriales et financières du traité ; elle insistait sur ce qu’avait de pénible pour elle la nécessité de se séparer de ses frères du Luxembourg et du Limbourg après tant d’années d’existence commune ; elle faisait valoir les calculs erronés qui avaient servi de base à la partie de la dette mise à sa charge, l’énormité des sacrifices que l’état armé lui avait imposés. Ses réclamations étaient sans fondement : à quel titre pouvait-on arracher à la Hollande des territoires qui ne lui avaient été concédés qu’en échange d’autres possédés anciennement ? Les sacrifices n’avaient-ils pas été bien plus considérables du côté de la Hollande, sur laquelle était retombé le fardeau entier de l’état de guerre, tandis que la Belgique, protégée par les armées de la France et les flottes de l’Angleterre, avait trouvé de larges compensations dans les revenus qu’elle retirait des territoires occupés provisoirement, dans la libre navigation des eaux hollandaises, dans le non-paiement de ses arrérages ? La résistance du roi Guillaume avait-elle été illégitime ? L’Angleterre n’aurait-elle pas résisté également à une révolte de l’Irlande ? La Russie venait de châtier la Pologne soulevée ; l’Autriche avait prévenu de même l’insurrection du Milanais frémissant sous le souffle du carbonarisme. La Belgique ne devait-elle pas, sinon le prix de son indépendance, au moins sa part de l’ancienne dette commune ? Mais la