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afin que le sang ne tache pas les ailes. Le mâle de l’autruche (delim), quand on le saigne, surtout devant ses petits, pousse des gémissemens lamentables; la femelle (reumda) ne jette aucun cri.

Lorsque l’autruche est sur le point d’être atteinte par le cavalier, elle est tellement fatiguée, que, si le chasseur veut ne pas la tuer, il lui est facile de la ramener doucement en la dirigeant avec son bâton, car elle peut à peine marcher.

Immédiatement après avoir saigné l’autruche, on l’écorche avec soin, de manière à ne pas gâter les plumes, puis on étend la peau sur un arbre ou sur le cheval. Les chameaux arrivent, et on saupoudre fortement de sel l’intérieur de la dépouille. Les domestiques allument des feux, disposent les marmites, et font bouillir long-temps à grand feu toute la graisse de l’animal. Lorsqu’elle est devenue très liquide, on la verse dans une sorte d’outre formée avec la peau de la cuisse au pied, solidement attachée à sa partie inférieure. La graisse de l’autruche en bon état doit remplir ses deux jambes; partout ailleurs la graisse se gâterait. Lorsque l’autruche couve, elle est très maigre, et sa graisse alors serait loin de remplir ses deux jambes; on ne la chasse à cette époque que pour la valeur de ses plumes. Le reste de la chair est employé au souper des chasseurs, qui la mangent assaisonnée de poivre et de farine.

Les domestiques ont fait boire les chevaux et leur ont donné l’orge. Tout le monde s’est un peu restauré, et s’empresse, quelle que soit la fatigue de la chasse, de retourner au lieu où l’on a laissé les bagages. On s’y arrête quarante-huit heures pour faire reposer les chevaux. Pendant ce séjour, ils sont l’objet des plus grands soins; puis on retourne dans ses tentes. Parfois on envoie le produit de la chasse au douar; les domestiques rapportent des provisions, et, sur de nouveaux renseignemens, on renouvelle l’entreprise.

La graisse de l’autruche est employée pour préparer les alimens, le kouskoussou par exemple; on la mange également avec du pain. Les Arabes s’en servent en outre comme remède dans un grand nombre de maladies. Pour la fièvre, on fait avec cette graisse et de la mie de pain une espèce de pâte: on la donne à manger au malade, qui ne doit pas boire de la journée. Dans les maux de reins, les douleurs rhumatismales, on en frictionne la partie souffrante jusqu’à ce qu’elle en soit pénétrée; puis le malade se couche dans le sable brûlant, la tête soigneusement couverte; une transpiration très active s’établit, la guérison est complète. Dans les maladies de bile, la graisse d’autruche légèrement chauffée et devenue comme de l’huile, puis un peu salée, est prise en potion. Elle produit des évacuations excessives jusqu’à causer une maigreur extraordinaire. « Le malade se débarrasse de