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riveraines, en prolongeant la frontière des Huns, multiplia leurs points de contact avec l’empire romain.

Dans cette situation, les Huns, qui ne cultivaient point et qui eurent bientôt détruit le peu de culture qu’ils avaient trouvée, ne pouvaient vivre sans recevoir des Romains du blé et de l’argent, ou sans piller leurs terres. Il fallut donc de toute nécessité que Rome les prît à sa solde, et ils la servirent bien soit contre les autres, soit contre eux-mêmes. Qu’on se représente l’empire mongol toutes les fois qu’il ne fut pas concentré dans la main d’un Tchinghiz-Khan ou d’un Timour ; c’est le spectacle qu’offrait alors l’empire des Huns : des hordes séparées, des royaumes distincts, des chefs indépendans ou à peu près, reconnaissant à peine un lien fédératif. L’un menaçait-il quelque province romaine d’une invasion, l’autre proposait aussitôt à l’empereur des troupes auxiliaires pour la défendre. C’était une joûte autorisée entre frères, une industrie pratiquée par tous et réputée d’autant plus honnête qu’elle était plus lucrative. La faiblesse du lien fédéral se faisait surtout sentir entre les deux groupes principaux de la domination hunnique. Les Huns blancs et toutes les hordes caspiennes qui n’avaient point suivi Balamir prétendaient se gouverner, faire la guerre ou la paix à leur fantaisie ; il en était de même des tribus qui, bien qu’appartenant aux Huns noirs, s’étaient arrêtées près de la limite de l’Europe sans pousser plus loin. La politique romaine, habile à ce genre de travail, s’interposait dans ces séparations pour les élargir, ne négligeant ni l’argent ni les promesses, et recherchant surtout l’alliance des Huns orientaux afin de contenir ceux du Danube. La tribu royale elle-même n’avait point d’unité, et ses membres, qui se partageaient le gouvernement des tribus, agissaient chacun de son côtés. Ce fut la terrible volonté d’Attila qui leur imposa cette unité d’action comme un premier pas vers la formation d’un empire unitaire.

Théodose, qui avait pour système de tenir en échec les auxiliaires barbares les uns par les autres, employa les Huns pour contrebalancer les Goths, dont il redoutait la force. Cette politique fut également celle de ses fils. Nous voyons, en 405, un certain Uldin, roi des Huns, servir Honorius contre les bandes de Radagaise, et décider par une charge de sa rapide cavalerie la victoire de Florence. Uldin avait déjà mérité les bonnes graces d’Arcadius en lui envoyant, bien empaquetée, la tête du Goth Gaïnas, général romain, en révolte contre son empereur et réfugié au-delà du Danube. Il semble que toutes les fois qu’il s’agissait de se mesurer avec les Visigoths, qui n’étaient pour eux que des sujets fugitifs, les Huns ressentissent un redoublement d’ardeur. Avec les embarras de l’empire, les contingens hunniques s’accrurent ; déjà nombreux sous Honorius et Arcadius, ils le devinrent