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les dépenses quotidiennes du ménage sont augmentées par tête de maître ?

— Je ne supposais pas qu’à la campagne une tête de plus ou de moins pût faire une différence notable ; mais, j’en dois convenir, je n’ai jamais fait ce calcul.

— Vous êtes charmante, savez-vous, dans votre naïveté ; pourtant demandez à lady Macfarren… Justement, ce matin, nous examinions ses comptes… C’est étonnant ce qui se dépense ici de plus pendant la saison des chasses… en bois, en bougies, en gaspillages de toute sorte…

Eleanor jeta les yeux du côté de lady Macfarren, qui rougit quelque peu, mais n’ajouta pas un mot.

— Oui, reprit Tabitha du même ton de voix, nous calculions tout cela, et je m’étonnais que lady Raymond n’eût pas songé à quelques petits arrangemens,… vous savez…

— Mais, allait répondre Eleanor, prise à court et stupéfaite, ma mère se croyait ici en visite ?… Cependant elle se tut et regarda derechef lady Macfarren… Cette fois, la glace était rompue, et l’intrépide Écossaise n’hésita plus.

— Sans doute, sans doute… Même entre parens, cela se fait. Après la mort de mon père, nous avions arrangé avec mon frère qu’il passerait ici trois mois chaque année, et que je passerais trois mois à Penrhyn-Castle… J’y perdais certainement,… car une femme et un homme, c’est bien différent, avec le vin, les liqueurs, tout ce qui s’ensuit… Plus tard, nous avons changé nos arrangemens… Nous avons établi qu’on paierait tant par tête et par mois : tant pour un garçon, tant pour un ménage, tant par domestique… Mais je ne m’attendais pas au mariage qu’il ferait, et nous ne sommes convenus de rien pour…

— Pour une tierce personne, acheva Tib, voyant que lady Macfarren avait quelque peine à finir sa phrase.

Ce jour-là, Eleanor s’était promis de savoir de son mari quand il comptait quitter Glencarrick. Elle fit plus ; elle lui demanda formellement de l’emmener chez lui, elle et sa mère.

Quelques ménagemens qu’elle eût mis à lui témoigner ce désir, elle le vit fort mal accueilli. Sir Stephen lui déclara nettement qu’il entendait finir à Glencarrick la saison des chasses, et trouvait singulier que des querelles de femmes vinssent à la traverse de ses plaisirs. — li avait prévenu Eleanor qu’elle et sa mère avaient à ménager le caractère un peu rude de lady Macfarren ; comment ne se l’étaient-elles pas tenu pour dit ? À présent, si lady Macfarren était fâchée, il fallait lui faire des excuses. Quant à payer les dépenses de sa belle-mère, il y était tout prêt, si Eleanor le souhaitait, et il regrettait de n’y avoir pas