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Les bois, les vents, les flots sont pleins d’esprits sonores ;
De vivantes odeurs voltigent sur les prés.
L’ame luit à travers les yeux des météores :
Je sens, je vois, j’entends ces messagers sacrés.

À ces pouvoirs de l'air sitôt que je me livre.
Sans rien faire pourtant que respirer et voir.
Je sens mes bras plus forts, mon cœur prêt à revivre,
Comme un arbre arrosé des pleurs secrets du soir.

De quelques noms divers que la langue les nomme,
Ces esprits d’une autre ame émanent chaque jour ;
Venus de l’invisible et se montrant à l’homme,
Tous me parlent aussi d’un mystère d’amour.

Tous semblent me pousser sur une même route
D’où le vulgaire impur s’est lui-même banni,
Sur ces échelons d’or renversés par le doute
Qui vont du globe à Dieu, du cœur à l’infini.

ADMETE.

Par des liens plus doux la campagne m’attache ;
J’aime en toi ce qu’on voit et non ce qui se cache,
nature, et ces dons prêts pour chaque désir
Que dispense ta main et que je puis saisir.
J’aime ce que la fleur parfumée et vermeille
Dit aux yeux, et le chant des oiseaux à l’oreille ;
J’aime, pour tous les fruits dont tu les as chargés,
Ces coteaux généreux et gaîment vendangés.

ERWYNN.

La terre a d’autres fruits que les fruits que tu cueilles,
Plus doux que les raisins dont tu bois la liqueur ;
Un breuvage émané des rayons et des feuilles,
Sans passer par ma lèvre, enivre aussi mon cœur.

L’oiseau n’a pas de chants, dans sa voix printanière,
Divins comme les bruits du silence écouté ;
Les clartés que je vois en fermant la paupière
De l’aube orientale effacent la clarté.