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un trône chancelant. Les liens de parenté et de vasselage qui unissaient les Arsacides d’Arménie à ceux de la Perse durent multiplier et rendre plus étroites les relations qui existaient déjà entre leurs sujets. Le culte du feu, le zoroastrisme, était en vigueur chez les uns et les autres, mais avec un mélange de polythéisme grec dont il s’était fortement imprégné, lorsque les Séleucides introduisirent en Orient la civilisation de la Grèce, à laquelle les Parthes eux-mêmes firent plus d’un emprunt. Les modifications apportées par les Arsacides arméniens à la constitution politique de leur royaume, en appelant auprès d’eu ; , les grands feudataires, maîtres presque absolus dans leurs satrapies, et en les attachant à leur service par la création et l’investiture de charges de cour, furent sans aucun doute une imitation de ce qu’avait fait en Perse la branche collatérale, et l’on peut juger des institutions que possédait alors ce dernier pays par les détails que Moïse de Khorène nous fournit sur celles de l’Arménie à cette époque.

Au commencement du IIIe siècle, le roi de Perse Artaban (Ardavan) fut renversé par Ardeschir (l’Artaxercès des historiens byzantins), qui inaugura une nouvelle dynastie, celle des Sassanides, et se proclama l’héritier du trône des Achéménides et le restaurateur du pouvoir national, usurpé par les Parthes, considérés comme des étrangers. Il s’appliqua à rétablir les doctrines de Zoroastre dans leur pureté primitive et à proscrire les idées grecques, prédominantes sous les Arsacides. La nouvelle dynastie fut naturellement l’ennemie de celle qui régnait sur l’Arménie, et qui était alliée par le sang aux princes déchus. Une lutte s’engagea, dans laquelle l’Arménie finit par succomber, et elle reprit ces habitudes du joug qui lui étaient familières. Resserrée entre deux empires formidables, Byzance et la Perse, qui, en 387, la démembrèrent en se la partageant, elle conserva encore quelques années ses souverains, jusqu’en 428, où Artaxès IV fut dépossédé par le roi de Perse, Bahram IV, et renfermé dans une forteresse de la Susiane, destinée aux prisonniers d’état et appelée du nom très significatif de Château de l’Oubli (Anousch Pert). Elle ne fut plus dès-lors administrée que : par de simples gouverneurs.

Lorsque le christianisme se fut assis avec Constantin. sur le trône des - césars, et que le siège de l’empire eut - été transféré à Byzance, l’Arménie embrassa aussitôt la nouvelle loi religieuse.- Un jeune enfant de la race royale des Arsacides, sauvé du massacre qui enveloppa toute sa famille, fut emporté par sa nourrice à Césarée de Cappadoce où il fut élevé dans la foi de l’Évangile. Cet enfant, que Dieu avait marqué au front du sceau de la sainteté et du génie, et qu’il avait réservé pour être l’apôtre de l’Arménie reçut au baptême le nom de Krikorios (Grégoire), auquel s’ajouta dans la suite celui de Loussavoritch, c’est-à-dire illuminateur, parce que, suivant l’expression de l’hymne chanté