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Page:Revue des Deux Mondes - 1852 - tome 14.djvu/912

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présent, cette partie des projets de la compagnie n’a pas reçu son exécution. On ne paraît pas s’être occupé d’ailleurs d’installer sur le Pacifique une ligne de navires allant à San-Francisco, et le transit à travers le pays de Tehuantepec ne pouvait présenter des chances de succès qu’à cette condition. L’Alabama a cependant continué de faire son service pendant quelques mois, mais il est vrai qu’il touchait à la Vera-Cruz, où il pouvait prendre et débarquer des voyageurs. Pendant ce temps-là, l’expédition commandée par le major Barnard faisait la reconnaissance de l’isthme. Le résultat de ses opérations n’était pas bien connu il y a quelques mois, mais on a acquis la certitude que l’exécution d’un chemin de fer dans cette contrée ne rencontrerait pas de difficulté sérieuse résultant de la configuration du terrain.

Cependant de nouveaux incidens sont venus mettre des entraves aux progrès de l’entreprise de Tehuantepec. Dans le courant de l’année dernière, le congrès mexicain a refusé, pour divers motifs, de reconnaître la cession qui avait été faite par M. de Garay à des tiers, et le gouvernement du Mexique a dû, sur l’invitation du congrès, enjoindre à la nouvelle compagnie de cesser ses opérations, en menaçant de peines sévères ceux qui n’obéiraient pas à cette injonction. La compagnie, de son côté, a fait connaître l’intention où elle était de passer outre, se fondant sur ce que les droits dont elle était devenue propriétaire avaient été reconnus précédemment par le Mexique. Il est probable que le gouvernement américain finira par intervenir, et il est difficile de prévoir quel sera le résultat de son intervention. La décision du congrès mexicain a été dictée sans doute par un sentiment de méfiance qui se conçoit et s’explique fort bien. Les immenses concessions de terrains faites à M. de Garay et transmises par celui-ci à ses successeurs permettraient aux citoyens américains de venir fonder là des établissemens nombreux, dont la population dépasserait bientôt celle qui se trouve actuellement sur l’isthme. On serait modeste en commençant ; plus tard, quand on se sentirait plus fort, on deviendrait peut-être agressif. L’exemple de ce qui s’est passé il y a quinze ans au Texas est là pour prouver que ces suppositions n’ont rien de chimérique ; les Mexicains savent ce que leur a coûté cette colonisation du Texas par les Anglo-Américains. Après avoir perdu au nord une bonne partie de leur territoire, ils craignent peut-être de subir à l’autre extrémité, du côté du sud, un nouveau démembrement après lequel le Mexique pourrait s’attendre d’un moment à l’autre à être rayé du nombre des nations indépendantes.


Nous venons de montrer quels progrès a faits la question si longtemps débattue de la jonction des deux océans qui entourent le continent américain. C’est, comme on le voit, dans la Nouvelle-Grenade, à