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susceptibilités. Quand les bases mêmes du gouvernement étaient en question, il eût été imprudent d’appeler le débat sur les principes de notre droit public en ce qui concerne les cultes. Quoi qu’il en soit, les deux assemblées ont fait imprimer, avec des exposés de motifs, les projets qu’elles ont adoptés. L’assemblée de la confession d’Augsbourg a même publié ses procès-verbaux. Aidé de ces documens, nous pouvons essayer d’apprécier la nature, l’importance et l’opportunité des réformes proposées.

Dans les deux assemblées, on convint d’éviter les discussions dogmatiques. Il avait été proposé à l’assemblée des églises réformées de délibérer au préalable une profession de foi. C’était, disait-on, le devoir d’une assemblée réunie dans un intérêt religieux. Avant de constituer l’église et de faire ses règlemens, il était nécessaire de proclamer sa doctrine, sa foi, son dogme, de lier toutes les consciences dans un symbole commun. Plus l’église s’attacherait fermement à ce symbole, plus elle grandirait eu puissance et en autorité. Ce devoir accompli, elle arrêterait d’une main plus sûre sa constitution intérieure. Cette proposition accusait plus d’entraînement religieux que de sagesse pratique. En contradiction avec le mandat donné aux délégués par les consistoires, qui ne leur avait attribué aucune compétence sur le dogme et ne les chargeait que de l’examen des modifications à apporter à la loi organique, elle aurait eu pour effet de convertir en une sorte de concile une assemblée dont la mission était purement administrative et réglementaire, de soulever des controverses irritantes et peut-être d’amener de funestes déchiremens. Elle était d’ailleurs inspirée par des opinions exclusives, qui n’admettaient ni tempérament ni transaction, qui avaient ardemment poursuivi la séparation absolue de l’église et de l’état, et qui, sans tenir compte des temps, des lieux et des circonstances, proposaient en exemple aux protestans français la conduite de l’église d’Ecosse et de celle du canton de Vaud. Aussi ne fut-elle point adoptée ; deux des dissidens qui l’avaient faite se retirèrent avec éclat, publièrent des protestations, firent appel à leurs coreligionnaires, mais n’empêchèrent point l’assemblée de continuer paisiblement ses travaux. Aucun débat ne s’engagea sur ce point dans la réunion de la confession d’Augsbourg. Personne ne demanda que la discussion sortît du cercle qui lui avait été tracé de propos délibéré dans les élections des délégués. Il était pourtant nécessaire, dans un projet de loi relatif aux seuls protestans, de définir les signes auxquels on reconnaîtrait ceux qui seraient soumis à ses dispositions. L’assemblée de la confession d’Augsbourg considéra comme membres de l’église « les fidèles inscrits sur le registre de la paroisse, » et l’assemblée réformée, ceux qui « justifieraient de leur première communion et qui reconnaîtraient la Bible pour la parole de Dieu et l’unique règle de leur foi. »