permettent de marquer mieux que jamais sa place au sein de l’Allemagne. Si le Wurtemberg et Bade persistent dans la résolution qu’ils ont prise de se séparer de la coalition de Darmstadt, si la Saxe fléchit, comme la Prusse paraît l’espérer, la Bavière affaiblit, par un échec qu’elle pouvait s’épargner, une situation acquise par quatre années d’heureux efforts.
Le jeune empereur d’Autriche continue en ce moment les excursions qu’il a entreprises pour apprécier par lui-même l’état des pays ravagés par la guerre de Hongrie et pour y porter des paroles de consolation et d’encouragement. À la fin de juin, c’étaient les populations magyares qu’il visitait, c’est à Bude, à Debreczin et dans tous les grands foyers de la dernière insurrection qu’il s’arrêtait de préférence. Nous avons dit quelles séductions il a exercées sur l’imagination des Hongrois par son affabilité, ses allures vives, ses manières aisées sous l’uniforme national, et la distinction avec laquelle il s’exprimait dans la langue du pays. Quand les rebelles de 1848 ont fait au roi de Hongrie un accueil si chaleureux, comment pouvaient le traiter les populations qui avaient embrassé la cause de l’Autriche contre l’insurrection hongroise, les Serbes de la Waivodie et du Banat ? En se rendant parmi eux, l’empereur savait qu’il pouvait compter sur les manifestations de leur attachement. Il vient donc de parcourir les lieux qui ont été témoins de ces combats obscurs, mais acharnés, où l’on a vu éclater, bien mieux que dans les grandes batailles livrées à l’ouest de la Hongrie, le vrai caractère de cette guerre de races, toutes ces luttes de familles et de tribus qui font de l’insurrection magyare un des épisodes les plus intéressans de l’histoire contemporaine. Afin d’ajouter à l’originalité des hommages que l’empereur recevait dans ces rudes contrées, de nombreux représentans des Serbes sont venus le saluer à Semlin, sur la frontière ottomane, au confluent de la Save et du Danube. Les Serbes de la Turquie eux-mêmes n’ont point manqué au rendez-vous. On y a vu le fils de George-le-Noir, le prince Alexandre de Serbie, avec son état-major d’officiers, qui doivent moins à l’art qu’à la nature. Parmi eux, on remarquait un de ces héroïques chefs de bandes qui, en 1848, passèrent le Danube pour venir apporter le secours de leurs bras aux Serbes du Banat, un guerrier dont le nom est aujourd’hui dans les légendes du pays, et qui balança un instant sur ce terrain la popularité de Jellachich : Étienne Knitchanine. De Semlin, l’empereur pouvait contempler, sur l’autre rive du Danube, les maisons blanches de Belgrade, l’un des foyers de la propagande slave, et derrière Belgrade, à droite et à gauche, ces formidables montagnes que les Serbes de l’Autriche regardent comme leur berceau, et où ils menaçaient d’émigrer, s’ils eussent été vaincus par les Magyars. François-Joseph a rencontré parmi ces populations les sentimens les plus empressés. Les Slaves pourtant n’ont point la verve expansive des Magyars. La gravité empreinte de mélancolie qui leur est propre ne se prête point à ces épanchemens de la cordialité qui sont si familiers à la race hongroise. Si donc l’on se rendait compte de la différence des tempéramens, qui distingue les deux populations, l’on serait porté à croire que les Serbes sont aujourd’hui moins dévoués que les Magyars à l’empereur. En réalité, les uns et les autres se disputent la faveur du souverain, car leurs contestations ne sont point peut-être irrévocablement terminées. Chaque jour encore les Hongrois demandent que l’on réunisse à leur territoire le pays serbe, qui en a été séparé en 1848 ; chaque