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subsiste à l’égard de toute réunion formée de personnes revêtues d’un caractère public, pourvues d’une capacité officielle et se proposant en cette qualité de prendre des résolutions. Les magistrats, les militaires, les administrateurs ne pourraient, en aucun cas, former des assemblées sans la permission du gouvernement. La même défense est faite, pour de simples correspondances, aux conseils-généraux des départemens, quoiqu’ils soient composés par l’élection et, à ce titre, placés dans une sorte d’indépendance à l’égard du pouvoir. Si de pareilles assemblées pouvaient librement se tenir, la puissance publique serait incessamment minée par les résolutions qui y seraient prises et par les coalitions qui s’y organiseraient. Il en doit être de même à l’égard du clergé, quoique sa mission soit purement spirituelle et ne touche pas à l’action même du gouvernement. Il est nécessaire que le gouvernement puisse s’assurer que les délibérations ne sortiront pas de cette sphère, et comment en aurait-il la certitude ! si les assemblées se formaient sans son aveu ? En outre, même dans le cercle des questions spirituelles, le magistrat politique est le juge suprême de l’opportunité, de la convenance des délibérations projetées. Autrement, quelle garantie contre les délibérations qui troubleraient les consciences, altéreraient la pureté du dogme et blesseraient la religion elle-même ? Malgré ces puissantes considérations, les évêques de diverses circonscriptions métropolitaines ont annoncé, dans les dernières années, l’intention de se réunir en synode, sans autorisation. Le gouvernement s’est empressé de leur donner d’office une permission dont ils paraissaient décidés à se passer. Il ne la leur eût certainement pas refusée, si elle eût été demandée ; mais on a voulu afficher une indépendance qui n’était pas reconnue, même dans la constitution où l’on prétendait la puiser. Ces conflits sont regrettables. Le clergé se croit-il au-dessus des lois, et lui convient-il d’apprendre au peuple, par son exemple, à les mépriser ?

Autrefois les assemblées du clergé étaient fréquentes : elles étaient ordinairement autorisées tous les cinq ans, le clergé des diocèses se réunissait à son tour en synodes ; mais ces réunions avaient pour objet des intérêts temporels et économiques qui ont cessé d’exister. Propriétaire de biens considérables, dispensé de l’impôt qu’il remplaçait à son gré par des dons volontaires, constitué en ordre, dans l’état, le clergé éprouvait le besoin de régler ses affaires. Aujourd’hui, rien de semblable ; cependant des assemblées du clergé peuvent encore offrir des avantages considérables. Si nous ne nous trompons, elles seraient éminemment propres à faire revivre les anciennes traditions et les anciennes maximes de l’église gallicane. On se plaint de l’influence et du progrès des doctrines ultramontaines ; mais où le clergé catholique peut-il trouver une direction, des conseils, des lumières, ailleurs qu’à