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Page:Revue des Deux Mondes - 1852 - tome 16.djvu/1101

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Newgate, Nedham fut sauvé par Lenthall, président de la chambre des communes, et Bradshaw, président de la haute-cour de justice, tous les deux indépendans, qui voyaient avec défiance le parti presbytérien et étaient bien aises d’avoir une bonne plume à leur service. C’est alors que Nedham fonda, pour sa troisième opinion, son troisième journal, le Mercure politique, qu’il rédigea pendant dix ans avec toute la faveur de Cromwell, et dont il fit le journal le plus répandu et le plus influent de l’Angleterre. A la restauration des Stuarts, Nedham eut encore le talent de se tirer d’affaire; mais il renonça cette fois au journalisme, et se contenta d’exercer la médecine avec beaucoup de succès et de profit jusqu’à sa mort, arrivée en 1678. A côté du Mercure politique de Nedham, il faut mentionner un journal satirique et burlesque, entremêlé de prose et de vers, le Mercure rustique, rédigé aussi par un gradué d’Oxford, George Wither, qui avait abandonné le barreau pour se faire journaliste et soldat.

Du côté des royalistes, l’écrivain le plus distingué était John Birkenhead, ancien secrétaire de l’archevêque Laud, fellow et professeur à Oxford. C’était un homme de cour, de manières élégantes, brillant de saillie et de verve, qui jetait le ridicule à pleines mains sur les parlementaires. Il était aidé dans la rédaction du Mercure de la Cour (Mercurius Aulicus) par un autre homme d’église, Pierre Heylin, écrivain passionné, qui avait le talent de l’invective. Après la restauration, Birkenhead fut fait chevalier, devint membre de la chambre des communes, membre de la Société royale de Londres, dignitaire de l’université d’Oxford et maître des requêtes. Cette dernière place lui valait seule 3,000 livres sterling par an. Pierre Heylin devint sous-doyen de Westminster et se montra un prédicateur de mérite. Ces détails, qu’il serait facile de multiplier, marquent suffisamment quel chemin avaient fait les journaux et quelle importance ils avaient acquise. Ils tenaient sans doute encore beaucoup du pamphlet, mais ils tendaient à perdre ce caractère. Il y avait une polémique suivie entre les journaux de la cour et du parlement; on s’attaquait, on se répondait de part et d’autre, on se parodiait quelquefois, on s’injuriait très souvent. Le journal n’était plus un objet de commerce, c’était un instrument politique, et des libraires il était passé, comme on a pu le voir, aux mains de véritables écrivains, qui presque tous étaient des hommes instruits et de mérite sortis de l’église ou du barreau. Un autre progrès s’était accompli dans le mode de publication des journaux : sous Cromwell, qui ferma la bouche aux feuilles royalistes, et qui fut fort malmené par les feuilles républicaines, l’établissement du service des postes avait obligé les journaux à paraître avec ponctualité, afin de pouvoir être expédiés régulièrement chaque semaine dans les provinces.

La restauration des Stuarts, qui porta en apparence un rude coup