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HASSE ET LA FAUSTINA.





Il y a long-temps qu’il existe des relations historiques entre l’Allemagne et l’Italie. Malgré la barrière des Alpes que la nature a mise entre elles, ces deux nations, d’origine si différente et de caractère si opposé, n’ont pas cessé de se rapprocher et de se combattre tour à tour. Sans parler des Romains, qui ont franchi le Rhin du temps de César et d’Auguste, et qui ont déposé le long de ce fleuve magnifique les premiers germes de la civilisation, sans même s’arrêter à l’invasion des Barbares, qui ont mêlé, dans un désordre fécond, le génie du nord à celui de la race latine, l’empereur et le pape, ces deux moitiés de la puissance politique et spirituelle au moyen-âge, ne se sont-ils pas disputé pendant des siècles le gouvernement du monde ? La domination de l’Autriche sur la Lombardie, qui est le résultat final de cette lutte mémorable de l’empire et de la papauté, domination qui, pour le dire en passant, constate le triomphe des combinaisons politiques sur les antipathies de race et les obstacles naturels, a maintenu entre l’Allemagne et l’Italie des relations forcées qui ont eu leur influence sur les productions de l’esprit.

Venise aussi a eu des rapports constans et de toute nature avec l’Allemagne. Les villes d’Augsbourg et de Nuremberg ont été pendant long-temps les entrepôts de son commerce avec le Nord, points intermédiaires où elle faisait parvenir les richesses de l’Orient, dont elle a été la dispensatrice jusqu’à la fin du XVIe siècle. Ces relations tout extérieures en amenèrent nécessairement de plus intimes entre les esprits, et l’on peut dire que Venise a joué dans les temps modernes le rôle que la ville d’Alexandrie a joué dans l’antiquité : elle a été un confluent de doctrines diverses, un lieu prédestiné où s’est accompli le mariage mystique du Nord et du Midi, de la rêverie et du souffle panthéistique