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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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14 mars 1853.

Il règne en Europe un souffle singulier qui ne saurait rien changer sans doute, du moins d’un instant à l’autre, au fond de la situation générale du continent, mais qui court à la surface, suscite les incidens, modifie incessamment l’aspect des choses, et tient les esprits en suspens par la rapidité même avec laquelle se déplacent ou se renouvellent les questions. Un jour, les symptômes d’une certaine gravité s’accumulent, les complications se multiplient et semblent prendre une intensité presque redoutable ; le lendemain, ces symptômes s’évanouissent ou diminuent tout au moins ; ces complications entrent dans une voie de tranquille arrangement, la paix reprend le dessus, — et l’esprit public se calme. Il y a peu de temps encore, à peu de jours de distance, l’insurrection de Milan et l’odieuse tentative dont l’empereur François-Joseph a failli être victime venaient révéler le secret et opiniâtre ravage des passions révolutionnaires. Tandis que l’Autriche infligeait à la Suisse les sévérités d’un blocus pour sa participation présumée au soulèvement lombard, une démarche collective des grandes puissances continentales semblait imminente pour demander à l’Angleterre d’éteindre ce foyer permanent de propagande que la liberté de ses institutions entretient et développe. Au milieu de ces complications, déjà assez sérieuses par elles-mêmes, se réveillait, au sujet du Monténégro ou des lieux saints, cette grande et éternelle question de l’intégrité ou de la dissolution de l’empire ottoman. Ajoutez à la réalité ce que l’imagination invente si aisément ; il y avait assurément de quoi ne point envisager un avenir tout prochain sans quelque anxiété. Aujourd’hui l’affaire de Milan s’assoupit au milieu des répressions et des représailles de l’Autriche. Le jeune souverain de Vienne se rétablit d’une blessure plus grave peut-être qu’elle n’a paru au premier abord. Une note officielle, en retirant la France de ce concert supposé entre les cabinets du continent pour agir auprès de la Grande-Bretagne, ôte du moins quelque gravité à cette démarche, si elle a