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son lit, disant qu’il avait bien autre chose à faire qu’à soigner sa fièvre. Le prince Schwarzenberg agit de même, et, sans écouter davantage l’avis des médecins, il partit dans la nuit pour Innsbruck, où l’autorité de sa présence déjoua l’intrigue ourdie par le cabinet hongrois autour du faible Ferdinand. Le prince Schwarzenberg fut depuis un grand ministre, et l’histoire un jour appréciera l’impulsion féconde que sa main sut imprimer aux destinées nouvelles de son pays ; mais parmi les immenses services rendus par lui à l’Autriche, s’il en est de plus éclatans et de plus fameux, on n’en trouverait pas de plus utile. Qu’on pense, en effet, aux résultats qu’en de semblables circonstances un temps d’arrêt dans les hostilités aurait amenés. L’armistice, c’était en ce moment l’abandon de tous les avantages conquis, l’abdication dans la victoire, la démoralisation de l’armée, suprême élément de salut. De la réussite de cette démarche tout dépendait donc à cette heure, et le vieux Radetzky le savait à n’en pas douter, lui qui, au retour de Schwarzenberg, s’écriait en l’embrassant : « Bravo, prince, voilà une victoire qui nous coûte moins cher que Gustozza et qui vaut mieux ! »

Du reste, cette capitulation, à laquelle la diplomatie de lord Palmerston paraissait prendre un si vif intérêt, revenait sur le tapis à quelques semaines de là. Seulement cette fois les rôles n’ont plus la distribution tant souhaitée des conseillers secrets de la cour d’Innsbruck. C’est le roi de Piémont qui propose, et le maréchal qui dispose. À dater de Somma-Campagna, les opérations de Radetzky avaient pris le véritable caractère d’une marche triomphale. Vengono i nostri ! s’écriaient sur son passage les populations, heureuses d’être enfin débarrassées de ces hordes révolutionnaires, contre lesquelles l’armée piémontaise ne les sauvegardait plus qu’à demi. L’affaire de Volta, dernier effort de Charles-Albert pour reconquérir ses positions sur le Mincio, et l’immense déroute qui suivit ce coup de tête venaient de jeter le découragement et la confusion au camp des Piémontais. Au milieu des horreurs d’une débâcle générale, le roi tint conseil, et, rassemblant ses officiers autour de la couche de paille où la fièvre le consumait, il leur demanda ce qu’il y avait à faire. Tous furent d’avis que, dans l’état actuel des choses, continuer la guerre était devenu impossible, et qu’il fallait, coûte que coûte, gagner du temps. On arrêta donc que des ouvertures d’armistice seraient immédiatement entamées.

Le maréchal Radetzky était en train de prendre ses dispositions d’offensive pour le lendemain, lorsqu’on lui annonça l’arrivée à Volta des plénipotentiaires de Charles-Albert : « Schwarzenberg est là, se contenta de répondre le narquois guerrier ; dites que je m’en remets à lui du soin de cette négociation ! » Le roi proposait la ligne de