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commencement du XVIIIe siècle, et terminé en 1789, pour empêcher les deux lacs appelés Saint-Christobal et Zumpango de se déverser dans les lacs voisins de Mexico, que des débordemens avaient plusieurs fois inondé : ce canal a environ quatre lieues.

On m’a montré la pauvre civière sur laquelle on porte en terre les Indiens; j’ai recueilli sur leur inhumation des détails qui m’ont serré le cœur; ils sont enterrés, à la lettre, comme des chiens, sans vêtement; puis on piétine la terre, et tout est dit. — Un prêtre vient-il bénir les morts? ai-je demandé au guide qui me contait cela comme il m’eût conté toute autre chose. — Il vient, m’a-t-il répondu, pour les señores.

Nous sommes retournés à la première hacienda, ramenés par M. Buchan dans sa voiture, attelée, selon l’usage, de quatre mules, à cause des montées. Il nous apprend qu’on envoie tous les mois le produit à Mexico sous bonne escorte, dans une caisse métallique munie d’une serrure de Bramah. Comme il n’y a qu’un citoyen des États-Unis qui ait pu ouvrir ces serrures, on ne craint pas qu’elles le soient entre Real-del-Monte et Mexico; il faudrait deux heures aux voleurs pour les forcer. Nous quittons M. Buchan à Velasco, où est son habitation, et nous revenons coucher à Real-del-Monte. La soirée est fraîche. Nous avons encore une fois changé de climat : ce matin nous étions en Afrique, ce soir nous sommes en Europe.

En général, les mines sont une des nombreuses déceptions qui attendent le voyageur, quand il n’a pas assez d’expérience pour leur échapper. Descendre au moyen d’échelles dans un puits noir, suivre d’interminables galeries et voir quelques hommes donner des coups de marteau ou porter du minerai, c’est à peu près tout ce qu’ont à offrir de curieux aux voyageurs non métallurgistes les mines du nouveau comme de l’ancien monde[1]. Ce qui est intéressant dans la région de Real-del-Monte, ce sont les haciendas que nous avons visitées hier et les divers procédés employés pour extraire l’argent; mais, instruits par nos souvenirs, mon compagnon de voyage et moi nous nous sommes gardés de nous donner le plaisir de descendre, en touristes novices, des échelles interminables pour aller dans un trou. Nous nous sommes contentés d’admirer la machine à vapeur qui va puiser l’eau dans le fond de la mine de Dolorès, à quinze cents pieds, pour l’amener dans la galerie d’écoulement, située elle-même à une profondeur de cinq cents pieds. Le poids qui porte sur

  1. Je pois faire une exception pour la mine de Danemora eu Suède, où l’on descend à ciel ouvert au fond d’un abime, dans un panier suspendu à une corde, parmi des rochers très pittoresques.