Page:Revue des Deux Mondes - 1853 - tome 4.djvu/185

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

recensement de 1839, la proportion atteignait environ 300 têtes par mille habitans. Quant au nombre des bestiaux de la race ovine, l’infériorité de la Belgique est depuis longtemps constatée. De 996,000 têtes en 1816, les existences se sont réduites à 662,000 têtes en 1846. Il n’est donc pas permis de supposer que la Belgique serait en mesure d’importer en France de grandes quantités de bétail qui aviliraient la denrée. Même en l’état actuel, le prix du bétail sur pied vendu à Bruxelles est à peu près égal au cours des marchés de Sceaux et de Poissy.

En Prusse, il existait, suivant les calculs de 1846, 5,262,000 têtes de bêtes bovines et 16 millions de moutons; mais la production du bétail n’y est point surabondante, puisque les importations dépassent les exportations. En Bavière, les existences sont plus considérables; dans le grand-duché de Bade, elles se rapprochent proportionnellement de celles de la Prusse; enfin la Suisse et les états sardes ne paraissent point menacer davantage notre production. Voici, au surplus, un tableau qui présente aussi approximativement que possible les existences de bétail dans ces différens pays. La plupart des chiffres sont empruntés à un travail fort consciencieux, publié par M. Maurice Block et imprimé aux frais de la Société nationale d’agriculture[1].


Bêtes bovines Bêtes ovines
Belgique (1846) 1,099,000 têtes. 662,000 têtes.
Prusse. — 5,262,000 16,236,000
Bavière. (1843) 2,625,000 1,899,000
Bade. — 492,000 189,000
Suisse. — 950,000 550,000
États sardes. — 950,000 1,750,000
Espagne. — 2,000,000 18,000,000
Totaux 13,378,000 têtes. 39,286,000 têtes.

Le recensement de 1839 attribuait à la France près de 10 millions de bêtes bovines et 32 millions de bêtes ovines, c’est-à-dire des chiffres presque égaux au total des existences constatées dans l’ensemble des pays voisins, dont la population réunie dépasse 46 millions d’habitans. Conçoit-on dès lors que ces divers pays puissent nous envoyer de fortes quantités de bestiaux? Il faut bien qu’ils gardent ce qui leur est nécessaire pour leur alimentation, et on sait qu’en général leurs habitans consomment plus de viande qu’on n’en consomme en France. Ils seront stimulés, il est vrai, à accroître leur production, s’ils trouvent sur notre sol un nouveau débouché; mais d’une part on ne fabrique pas du bétail aussi aisément ni aussi vite qu’on fabrique des tissus, et d’autre part, qu’importe au cultivateur français que les bestiaux étrangers nous arrivent plus nombreux, pourvu que les prix ne descendent pas au-dessous du taux rémunérateur? Or il semble impossible que cette baisse se produise dans les conditions que nous avons signalées; d’après les lois ordinaires du commerce, il y a plutôt lieu de prévoir une hausse dans les pays voisins appelés à nous approvisionner qu’une baisse en France : ce

  1. Ce travail, intitulé des Charges de l’Agriculture dans les divers pays de l’Europe, forme un volume rempli de faits et de renseignemens utiles sur la situation économique, financière et sociale de tous les pays européens.