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POÉSIE





LES TAUREAUX.





Sur les âpres sentiers du coteau basaltique,
J’entends crier le char de la Cérès antique.
Les blés étant semés, avant la fin du jour
Il ramène au hameau les outils du labour.
Sur le timon de frêne, un jeune bouvier celte,
L’aiguillon à la main, se dresse fier et svelte.
Dirigeant de sa voix qu’il adoucit encor
Ses taureaux accouplés comme au temps de Nestor.
Dans les plis de leur cou, le poil frémit et fume.
Les voilà dans la cour, le poitrail blanc d’écume.
Le maître alors paraît lui-même, et de sa main
Leur enlève le joug qu’ils reprendront demain;
Et sur leurs fronts touffus, pour effacer l’empreinte,
Un enfant les caresse et les frappe sans crainte.
Sous sa verge d’osier je me plais à les voir.
Dociles et joyeux, marcher vers l’abreuvoir;
Puis, libres et gardant un calme qui m’étonne,
Brouter avec lenteur l’herbe rare d’automne.
Alors au bord du pré je m’arrête, et souvent,
Jaloux de ce repos, je leur parle en rêvant :