Page:Revue des Deux Mondes - 1853 - tome 4.djvu/774

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

J.-A. Hansen, ont voulu s’emparer des affaires, sans doute pour exécuter facilement et sans entraves les réformes qu’ils méditaient ; mais cette ambition nouvelle les a jetés dans de nombreux écarts qui ont effrayé la nation. Après avoir obtenu déjà que le droit de chasse fût conféré à quiconque cultive le sol, que des conditions fort avantageuses fussent offertes aux paysans fermiers de l’état pour le rachat de leurs fermes, qu’il fût permis d’aliéner les fermes appartenant aux fiefs ou majorats, — quand les propriétaires enfin sont presque tous fort disposés à aller au-devant des paysans fermiers, et à leur vendre à des prix très modérés les fermes et terres en toute propriété, — les Amis des paysans veulent encore que l’état, faisant un pas de plus, mais un pas vers l’injustice, la violence et le flagrant mépris du droit de propriété, contraigne les propriétaires à vendre leurs domaines à des conditions fixées d’avance par le gouvernement lui-même, et l’on ne peut pas douter que les Amis des paysans, qui, dans les dernières discussions, ont apporté au ministère l’appoint de leurs voix, ne demandent bientôt pour récompense la vente forcée des grandes propriétés en Danemark. Qui ne comprend combien cette prétention peut faire naître de complications et d’embarras intérieurs ? Les menaces que le pays, à tort ou à raison, croit distinguer pour l’avenir dans les espérances excessives des Amis des paysans éliraient les possesseurs de terres, et pèsent ainsi d’une manière fâcheuse sur l’agriculture, une des sources principales de la prospérité du Danemark. De plus, elles excitent la résistance des grands propriétaires et réveillent les anciennes prétentions féodales, source première de l’hostilité constante des duchés.

Nous avons vu quels obstacles s’opposent à l’indépendance du Danemark et au sage règlement de ses institutions. Des relations féodales, reste malheureux du moyen âge, en même temps qu’elles multiplient et confondent jusqu’à les rendre inextricables les attaches des différentes parties de la monarchie danoise, suscitent à l’intérieur même du royaume, grâce à une imparfaite constitution de la propriété, l’ambition des fermiers, l’exaltation de leurs imprudens amis et la résistance des grands propriétaires. D’autre part, la nécessité européenne, puisque le mot a désormais passé dans la langue politique du Nord, enlève au Danemark toute liberté extérieure. Malheureusement tout se tient dans l’édifice d’un état, et le commun accord des réformes sociales et politiques est nécessaire pour qu’il y ait entre les diverses institutions d’un même pays une harmonie parfaite. On pourrait bien attendre du bon sens et du patriotisme intelligent dont le peuple danois a donné tant de preuves l’accomplissement des dernières réformes sociales qui lui sont nécessaires, s’il n’avait les mains liées par son ennemie du dehors, la nécessité