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La
Marquise de Sablé


IV.[1]


L’affaire la plus considérable où Mme de Sablé ait mis la main, après la composition des Maximes, est la défense de Port-Royal. Par cet endroit encore elle appartient à l’histoire, et elle joue toujours le même rôle : elle provoque, elle inspire, elle soutient; mais elle fait plus par les autres que par elle-même. Son plus grand mérite littéraire n’est pas d’avoir écrit quelques maximes d’une parfaite politesse, mais qui ne s’élèvent guère au-dessus du médiocre : c’est d’avoir tourné de ce côté l’ambition et le talent de La Rochefoucauld. De même Elle a surtout servi Port-Royal en lui donnant Mme de Longueville.

On a peine à comprendre comment Mme de Longueville, consacrée en quelque sorte aux Carmélites par ses traditions domestiques : par sa belle-mère Catherine de Gonzague-Clèves, par ses deux tantes Catherine et Marguerite d’Orléans, toutes les trois bienfaitrices de l’ordre; par sa mère, la princesse de Condé, qui faisait de longues retraites au couvent de la rue Saint-Jacques, et voulut y être enterrée; par toutes les habitudes de son enfance et de sa jeunesse, par les plus tendres et les plus nobles amitiés; comment elle, qui appartenait naturellement à la famille de sainte Thérèse, qui avait tant désiré être carmélite, qui regrette sans cesse de ne l’être pas, qui avait un appartement dans la pieuse maison et y passait sa vie, qui voulut y reposer auprès de sa mère et de ses deux filles; comment elle enfin, la femme

  1. Voyez les livraisons du 1er janvier, 1er février et 1er mars 1854.