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paraissait sous ce titre : Relazioni degli ambasciatori Veneti al senato, raccolte, annotate ed edite da Eugenio Alberi. Il y en a en ce moment sept volumes publiés, et ce succès d’une entreprise particulière est vraiment digne de remarque, si l’on songe aux crises profondes qui ont tourmenté l’Italie. Une autre publication, consacrée en partie au même objet, c’est le recueil déjà célèbre intitulé Archivio storico italiano, imprimé aussi à Florence et dont le premier volume a paru en 1842, Pendant que la grande collection d’Alberi suivait son cours et que l’Archivio storico multipliait ses intéressans volumes, des savans isolés publiaient çà et là des relations importantes : celle de Giovanni Sagredo sur l’Angleterre en 1656 a été publiée à Venise (1844) par M. Agostino Sagredo ; celle de Batista Mario sur la France à l’époque du traité des Pyrénées a paru à Rome par les soins de M. Melchiorri (1844). M. Cicogna a donné à Venise (1845) la relation de Marco Minio sur Constantinople en 1521… Je pourrais en citer beaucoup d’autres. Je nommerai au moins parmi les disciples italiens de M. Ranke un écrivain allemand depuis longtemps établi au-delà des Alpes, M. Alfred de Reumont, M. de Reumont appartient à la littérature italienne par sa collaboration active à l’Archivio storico et par un savant tableau de l’histoire de Florence, Tavole cronologiche e sincrone della storia Fiorentina (1841) ; il représente surtout, au sein du mouvement historique de l’Italie, l’esprit et l’influence de M. Ranke. Dans un ouvrage publié tout récemment et dédié à l’historien des papes[1], M. de Reumont revient avec détail sur beaucoup de points rapidement indiqués par le maître : « Vous avez tracé les grandes routes, lui dit-il ; j’ai été çà et là après vous dans les sentiers de traverse. »

C’est ainsi que M. Ranke a donné des exemples littéraires à la science un peu confuse de l’Allemagne et qu’il a éveillé dans la brillante Italie le goût des recherches érudites. L’influence de M. Ranke ne s’est pas arrêtée là ; en Angleterre, M. Henri Ellis dans ses Original Letters, M. James Mackintosh dans son Histoire de la révolution de 1688, et tout récemment M. Bradford dans la Correspondance de l’empereur Charles-Quint (1850), ont publié aussi de curieuses études sur les ambassadeurs vénitiens et romains. Chez nous enfin, il y a une quinzaine d’années, un habile écrivain dalmate, M. Niccolo Tommaseo, publiait et traduisait, dans la grande collection des Documens inédits de l’Histoire de France, les relations des ambassadeurs vénitiens sur les règnes des derniers Valois. Quand M. Villemain chargeait M. Tommaseo de donner à la France les ambassades d’André Navagero, de François Giustiniano, de Jérôme Lippomano, de

  1. Beiträge zur italienischen Geschiche, von Alfred von Reumont. Berlin 1853, 2 vol.